La pratique de l’orientation évolue au fil du temps. On cherche ainsi à trouver diverses façons de faire, afin de faciliter la prise de décision de carrière, entre autres choses. On découvre de nouvelles approches et de nouvelles techniques. Dans le cadre de ses recherches, Krieshok (1998) parle de l’importance de deux dimensions qui favoriseraient la prise de décision de carrière. D’un côté, cela concerne le conscient et le rationnel et, de l’autre, l’inconscient et l’intuition. D’autres chercheurs dans le domaine, dont Gelatt (1989), Baumgardner (1977), Krieshok et coll. (2009), Krieshok et coll. (2011) ainsi que Motl et coll. (2018) se sont aussi intéressés à ces deux dimensions dans le contexte de la prise de décision de carrière.
On sait que la rationalité et le conscient sont accessibles par le langage verbal et l’écriture, ce qui est déjà mis en pratique en counseling de carrière. Mais comment accéder à l’inconscient et à l’intuition? L’art et l’art-thérapie sont des options à considérer. À ma connaissance, aucune recherche ne concerne l’utilisation de l’art-thérapie pour faciliter la prise de décision en counseling de carrière. C’est donc le thème qui a inspiré mon mémoire, qui sera bientôt publié (Brisebois, 2021).
La recherche qualitative que j’ai effectuée, composée de trois sujets qui sont conseiller d’orientation et art-thérapeute à la fois, ouvre la porte à d’intéressantes découvertes qui pourraient être explorées plus en profondeur éventuellement par d’autres études. Je vais donc vous révéler très brièvement certaines contributions de l’art-thérapie sur la prise de décision en counseling de carrière que mon travail a mises en lumière.
Les contributions de l’art-thérapie
Selon les résultats de mon étude, l’art-thérapie pourrait contribuer au processus de prise de décision en counseling de carrière. Premièrement, l’art-thérapie favoriserait la motivation. Ainsi, la clientèle auprès de laquelle l’art-thérapie est mise en pratique participerait au processus complet de counseling de carrière. D’ailleurs, certains clients décideraient de revenir après avoir atteint leur objectif dans le but de continuer de créer, alors que d’autres chercheraient à cultiver leur côté artistique nouvellement développé ou retrouvé.
Deuxièmement, l’art-thérapie favoriserait les prises de conscience. On note que l’acte de création comporte plusieurs prises de décision : choix de couleurs, de médiums artistiques et de formes.
Les comportements de prise de décision dans la vie se refléteraient dans les comportements lors de l’acte de création.
Ainsi, le client serait témoin de ses comportements nuisant à la prise de décision au cours de l’acte de création. De plus, en projetant les obstacles à sa prise de décision dans une création artistique, cela permettrait à la personne d’observer ces obstacles avec une distance et de prendre conscience qu’ils ne sont pas insurmontables, pour ensuite faciliter la résolution de problèmes.
Troisièmement, l’art-thérapie faciliterait le développement de la connaissance de soi. Ainsi, les interventions art-thérapeutiques utilisées en contexte d’orientation permettraient d’obtenir plus d’information sur les besoins, les champs d’intérêt, les aptitudes et les valeurs de la personne. Cette information se transmettrait au cours du choix d’images pour un collage, par exemple.
Quatrièmement, l’art-thérapie faciliterait l’expression de soi. L’art-thérapie travaille avec le langage non verbal, notamment, ce qui permettrait aux personnes qui ont de la difficulté à s’exprimer ou qui n’ont pas envie de parler de s’exprimer à l’aide d’images. L’expression de soi est d’ailleurs l’un des objectifs de l’art-thérapie.
Bref, les interventions en art-thérapie contribueraient à la motivation, aux prises de conscience, au développement de la connaissance de soi, à l’expression de soi et aux aptitudes de prise de décision en counseling de carrière.
Sur ce plan, les découvertes que mon mémoire m’a permis de mettre en relief sont fort intéressantes. En revanche, comme mon échantillon était limité, j’espère que ma recherche en inspirera d’autres dans l’avenir.
* Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre.
Bibliographie
Baumgardner, S. R. (1977). Vocational planning : The great swindle. The Personnel and Guidance Journal, 56(1), 17-22.
Brisebois, H. (2021). La mobilisation des interventions en art-thérapie au cours du processus de prise de décision en counseling de carrière. Mémoire, Université de Sherbrooke.
Gelatt, H. B. (1989). Positive uncertainty : A new decision-making framework for counseling. Journal of Counseling Psychology, 36(2), 252-256.
Krieshok, T. S. (1998). An anti-introspectivist view of career decision-making. The Career Development Quaterly, 46, 210-228
Krieshok, T. S., Black, M. D. et McKay, R. A. (2009). Career decision-making: The limits of rationality and the abundance of non-conscious processes. Journal of Vocational Behavior, 75, 275-290.
Krieshok, T. S., Motl, T. C. et Rutt, B. T. (2011). The evolution of vocational psychology: Questions for a postmodern applied discipline. Journal of Career Assessment, 19(3), 228-239.
Molt, T. C., Krieshok, T. S. et Multon, K. D. (2018). The effect of rational and intuitive decision-making strategies on interest appraisals. Journal of Career Assessment, 26(4), 616-630.