La société prépare l’individu à jouer un rôle social qui le confronte à ses rêves.  
Ressources et formations

Le besoin de rêver

Getting your Trinity Audio player ready...
Est-ce que c’est important … ? 

La société prépare l’individu à jouer un rôle social qui le confronte à ses rêves.  

François ne joue pas le rôle auquel il a été préparé. Mélanie joue le rôle qui lui a été attribué. Rémi, Nimar, Gigi et Jacques (re)définissent ou diversifient leur(s) propre(s) rôle(s). Sonia évite l’école pour réaliser son projet professionnel. 

L’École française reste essentielle pour certains jeunes et certaines familles. D’abord, elle reste importante aux yeux des parents d’élèves. Généralement, les parents veulent que leur enfant soit heureux. Certains parents rêvent d’études longues pour leurs enfants, d’autres aspirent pour eux à des études prestigieuses conduisant à un métier prestigieux ou rémunérateur, débouchant sur un emploi stable ou du travail. Les autres parents attendent de leur enfant des études tout court, souhaitant qu’il apprenne un métier afin qu’il devienne autonome sur le plan financier. 

Si l’École française ne fait plus rêver les jeunes, elle exerce encore une forte emprise sur eux, sur les familles, sur les recruteurs, sur les organisations et, par voie de conséquence, sur toute la société. Selon Dubet et Duru-Bellat, « Trop d’école tue l’école ». Mais cela est un autre sujet! 

L’école a-t-elle conscience de l’importance des rêves pour les jeunes, pour leur développement, pour leur santé mentale, pour les aider à mieux se connaître, pour leur permettre d’avancer dans leur vie personnelle et de contribuer positivement au développement du monde du travail et de la société? L’école peut-elle encore accorder une place aux rêves des jeunes? L’école peut-elle valoriser les rêves de la jeunesse? 

Bref, l’école actuelle peut-elle encore faire rêver les parents et les jeunes, tous les jeunes? Le rêve est une composante sensible de la dimension humaine. Un rêve ne peut pas être confié à n’importe qui. Un rêve peut être partagé avec une personne qui n’a pas sacrifié ses propres rêves. Un rêve partagé sera d’autant plus constructif qu’il est reçu par une personne qui accorde de l’importance à ses propres rêves. Accorder de l’importance à ses propres rêves ne signifie pas nécessairement concrétiser tous ses rêves.

Certains rêves gagnent à rester du rêve. 

En France, François, diplômé de la prestigieuse École polytechnique, se détourne d’un poste de direction qu’il pourrait occuper au sein de grandes organisations privées ou de grandes institutions publiques. Il opte comme plusieurs de ses camarades pour la prêtrise. Certains diraient que François a coûté cher et qu’il est surdiplômé par rapport à la fonction de prêtrise. 

Mélanie, jeune ingénieure, s’ennuie dans son organisation. Ses tâches réclament peu de ses compétences acquises laborieusement pendant cinq ans d’études exigeantes. Elle déprime en permanence. Pierre-Luc, actuaire au Québec, choisit d’arrêter de mourir un peu chaque jour. 

Rémi, 15 ans, déscolarisé, cherche sa voie à travers les réseaux sociaux. Sans projet personnel ni professionnel (ce qui est tout à fait habituel à cet âge), il a souhaité s’orienter en voie générale au lycée. La décision d’orientation prise par son établissement scolaire a été la voie professionnelle : première peine! À la suite de cette décision d’orientation, Rémi n’a pas été affecté en voie professionnelle faute de place : deuxième peine! Rémi s’est investi davantage dans les réseaux sociaux (d’autres jeunes dans cette situation de déscolarisation investissent leur temps de façon bien moins constructive). Rémi se cherche. Il fait des stages par ci par là. Il se lance dans la production de vidéos sur Instagram et se targue de dizaines de milliers de vues. 

Sonia, 14 ans, pratique l’école à la maison. Avec le soutien de sa famille et l’accord des autorités académiques, elle suit des cours à distance. Sonia bénéficie non seulement du soutien de sa famille, mais elle est également très autonome. À tel point que parallèlement à ses cours, elle développe, grâce aux réseaux sociaux, une activité indépendante dans l’onglerie. 

Nimar, 17 ans, scolarisé dans un lycée professionnel, n’arrive pas à obtenir la formation en systèmes numériques qu’il demande depuis deux ans. En attendant, ou plutôt sans attendre plus longtemps, il apprend le codage informatique grâce à un réseau de développeurs amateurs dans lequel il est proactif. Il crée son propre site Internet et offre déjà ses services. 

Gigi fait partie du personnel soignant; il développe de nouvelles compétences de façon informelle (et légale). Sa formation informelle par les réseaux sociaux lui apporte non seulement des milliers d’abonnés, mais surtout, une expertise qu’il peut proposer et défendre sur le marché du travail. 

Jacques (Attali) multiplie les rôles qu’il a envie de jouer dans la société. Il donne des leçons de vie sur les réseaux sociaux pour encourager chaque abonné à se définir lui-même, à suivre ses propres rêves et à se détourner des personnes qui représentent un danger pour leurs rêves. 

Derrière les années de formation (Polytechnique, école d’ingénieur, faculté de médecine, etc.) et derrière les écrans (Facebook, TikTok, Instagram, Pixelfed, Mobilizon, etc.) se cachent des phases de transition professionnelle plus ou moins visibles. Les trois phases décrites par Bridge et reprises par Roberge donnent à voir ce qui peut être vécu par les personnes en transition visible ou invisible : Arrêt, Errance, Redémarrage.

La phase dite de neutralité ou d’errance ou encore de saison hivernale reste la moins visible et aussi la moins agréable.

C’est la saison de dormance. Elle paraît contre-productive, inefficace, inutile, voire nuisible, parce que désagréable, alors qu’elle est indispensable avant l’arrivée du printemps. 

Les réseaux sociaux se présentent comme un été permanent, un support de projection d’avenir instantanée. Est-ce dans l’immédiateté qu’une vie professionnelle se construit? La période d’errance évoquée par Roberge est-elle évitable? Peut-on se réaliser sans traverser d’hiver? Serait-ce utile de développer notre capacité à supporter et à traverser notre hiver intérieur? 

L’hiver peut aussi être un temps de rêve, un temps de fermeture extérieure et d’ouverture intérieure pour faire le point avec soi-même. Pourquoi ne pas profiter de l’hiver pour RÊVER? 

P.S. « Le meilleur moyen de réaliser ses rêves, c’est de se réveiller » – Paul Valery 

* Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre.    

 

Psychologue de l’éducation nationale spécialisé en éducation, développement et conseil en orientation scolaire et professionnelle, Laurent exerce en France dans un centre d’information et d’orientation. Depuis 20 ans, il accompagne tout type de public notamment les scolaires. Il a passé une année en qualité d’étudiant au Département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke pour peaufiner ses compétences opérationnelles. Il mesure chaque jour la portée transculturelle d’un counseling au service de l’orientation et du développement de carrière. Il partage son expérience de l’accompagnement via l’écriture et la formation.
×
Psychologue de l’éducation nationale spécialisé en éducation, développement et conseil en orientation scolaire et professionnelle, Laurent exerce en France dans un centre d’information et d’orientation. Depuis 20 ans, il accompagne tout type de public notamment les scolaires. Il a passé une année en qualité d’étudiant au Département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke pour peaufiner ses compétences opérationnelles. Il mesure chaque jour la portée transculturelle d’un counseling au service de l’orientation et du développement de carrière. Il partage son expérience de l’accompagnement via l’écriture et la formation.
Latest Posts
  • La société prépare l’individu à jouer un rôle social qui le confronte à ses rêves.  
  • L’éducation à la connaissance de soi, des formations et des métiers a été officiellement lancée en France en 1996 avec deux circulaires ministérielles, une pour le collège et une pour le lycée.
  • Le présent billet vise à rebondir sur celui, récent,  de Jacques Limoges « Au gré des missions internationales » et à faire un lien avec mon précédent billet « Reconnaissez le génie de vos parents, mais faites votre vie! »