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Raisonner en termes de besoins et de projections
Dans un counseling de carrière, aider un client à raisonner en termes de besoins ici et maintenant et de projections dans le futur suppose que le conseiller veuille et puisse adopter une attitude à la fois flexible et de directionnalité. La flexibilité consiste à éclairer et respecter son processus psychologique, son rythme d’apprentissage et ses valeurs. La directionnalité consiste à diriger son attention vers les besoins actuels du client et à soutenir ses projections dans le futur.
Les projets émergent de leur histoire, d’un lieu, d’une époque, de désirs, d’influences, de rencontres et de choix subjectifs. La subjectivité, elle, dépend en partie de leur fonctionnement psychologique, de leur parcours de formation, de vie et professionnel, de leur rythme d’apprentissage, de leur santé, étape de vie, de la hiérarchisation de leurs valeurs, de leurs contextes géographique, familial et social, de leurs projections, de leurs stratégies pour tenter de combler leurs besoins, réaliser leurs projets personnels et professionnels.
En d’autres termes, les besoins universels relient les êtres humains. Tous les clients sont semblables en humanité. Leur subjectivité, leurs projections et leurs stratégies pour concrétiser leurs projets personnels et satisfaire leurs besoins les différencient.
Une fois évalué, le besoin (éventuellement déconditionné et « reconditionné ») peut éventuellement servir de guide d’intervention pour le conseiller, de boussole (de GPS aujourd’hui) et de point d’appui pour le client. Le raisonnement en termes de besoins peut également servir de grille de lecture du marché du travail en général et d’analyse des conditions de travail en particulier dans telle ou telle organisation.
Raisonner en termes de besoins et de projections peut avoir son utilité pour l’évaluation et l’intervention du conseiller comme pour la réalisation de soi du client.
Raisonner en termes de besoins et de projections, c’est adopter comme point de référence, c’est-à-dire comme point de départ et d’arrivée, les besoins et les projections du client. La combinaison de ses besoins et projections peut être nommée aspirations (scolaires, professionnelles, existentielles). Ici nous parlons de besoins physiques (sécurité et santé), relationnels (écoute, expression), psychologiques (sécurité, estime de soi, autonomie, compétences, connexion) et sociaux (appartenance et contribution au bien-être d’autrui) du client. Nous partons d’une définition large et partagée (elle aussi flexible) des besoins d’un être humain pour aider à la définition d’un projet professionnel précis et relié à un projet de vie.
Raisonner en termes de besoins et de projections nécessite une qualité de relation qui ne tombe pas du ciel. Ce type de raisonnement s’apprend et s’expérimente.
Concrètement, je ne recommanderais pas à un étudiant de choisir un métier s’il n’a pas une raison personnelle de le choisir ni l’envie de l’exercer.
Au mieux, dans le doute, il peut l’expérimenter et en tirer ses propres conclusions. Ainsi, du point de vue de la théorie de l’autodétermination, pour la satisfaction de ses besoins psychologiques, un client a tout intérêt à fonder ses choix sur une motivation intrinsèque (plaisir, intérêt) ou sur une motivation identifiée (vocation, convictions personnelles basées sur des valeurs) pour combler ses besoins d’autonomie, de compétences et d’appartenance. Comme nous le savons aujourd’hui, sans motivation autonome, il n’y a point de bien-être. La motivation autonome ne se réduit pas à la motivation intrinsèque. Elle comprend la motivation identifiée, celle qui permet d’affronter et de dépasser les inévitables moments difficiles. Cette motivation est très importante pour les étudiants. Elle permet de se maintenir aux études alors que certains cours sont sans intérêt pour eux, alors qu’ils n’ont aucune affinité avec certains enseignants et alors que l’organisation de la formation leur est déplaisante.
Si un étudiant n’a ni motivation intrinsèque (plaisir pour la matière, intérêt pour sa formation) ni motivation identifiée (vocation, convictions personnelles), il est probable qu’une motivation introjectée (éviter un sentiment de culpabilité, de honte ou de l’anxiété) ou/et qu’une motivation extrinsèque (argent, prestige) soit à la manœuvre.
Dans ce dernier cas, il sera nécessaire de « l’alimenter » avec beaucoup d’argent et de prestige pour qu’il se maintienne en formation, puis pour qu’il se maintienne dans son travail. Ce type de maintien encore efficace de nos jours se réalise au prix d’un mal-être permanent que ni l’argent ni le prestige ne peuvent réellement compenser.
Aider un client à cerner ses besoins représente une action psychologique. Cette action psychologique du conseiller aura autant même plus d’impact sur le client que la seule transmission d’informations sur l’offre de formation et sur le marché du travail. Aider un étudiant à clarifier sa motivation lui permet de faire des choix plus conscients et peut-être plus assumés. Aider un étudiant à clarifier ses valeurs et son éventuelle vocation contribue à mobiliser sa motivation autonome notamment sa motivation dite « identifiée ». Celle-ci représente cette force qui lui permet d’avancer contre vents et marées tout au long de son parcours de formation.
* Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre.