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Je viens de lire Relations difficiles au travail? Mode d’emploi pour une approche empathique et ferme, de Mathieu Guénette (édito, 2024), un guide pratique, cohérent et fort agréable à lire, dont je recommande grandement la lecture.
Pour concrétiser ce qu’il qualifie de méthode, Guénette donne avec à-propos des exemples nombreux et variés et, tout au long de l’élaboration de cette méthode, il utilise un cadre de référence, soit un même cas-type. Mu par un souci d’authenticité et une vulnérabilité calculée (position basse pour en quelque sorte servir d’exemple), l’auteur ne craint pas de faire ici et là des dévoilements sur ses propres erreurs et maladresses.
Chaque chapitre se termine par une mise en situation suivie de questions similaires et éventuellement de clés de correction.
Contrairement à une tendance déplorable chez de nombreux auteurs RH, consistant à cannibaliser les idées des autres sans aucun crédit, Guénette cite ses sources, le plus souvent des auteurs « tendance1 », tels que les Dulude, Goleman et Scott. Dans la foulée d’une pratique courante en RH, il fait bon usage de chiffrages (8 profils, « big five », 4 codes, etc.) et de sigles évocateurs (SI&SA, DUR, AIDA, etc.). En revanche, avec d’autres références telles Horney et Leary – qui ont également recours à des continuums comme adapté-inadapté (mécanismes de défense) ou sain-malsain (pathologies) – on pourrait atteindre le même objectif éthique, soit décider si dans ou hors de ses compétences et, le cas échéant, référer au bon professionnel), donc de quoi réconforter les lecteurs plus âgés comme moi, car du coup se sentant moins déphasés!
Par exemple en misant fréquemment sur une position basse2, sur l’humanisme « rogérien » sans pour autant épouser la non-directivité qui en découle – le présent auteur lui préférant la fermeté –, sur une empathie horizontale ou interchangeable voire – sans en faire mention – sur une soumission librement consentie (Beauvois et Joule); en somme, relativement loin des techniques et enjeux spécifiques au counseling comme l’alliance de travail; les scénarios passé, présent et futur; l’empathie avancée (niveaux 4 et 5) et l’intentionnalité.
Mais, sans aucun doute, une des contributions majeures de la méthode proposée par Guénette, réside dans un réel souci de dépathologiser ces relations difficiles en milieu de travail en recadrant les mécanismes de défense tels qu’élaborés dans le DSM, pour parler de huit profils avec une terminologie familière et plutôt sympathique : méfiant, fier, instable, caméléon, obéissant, timide, perfectionniste et compétitif.
L’auteur mentionne au passage regretter d’avoir utilisé des caricatures dans une publication précédente du fait que ces « simplifications » pourraient heurter certaines des personnes concernées. En revanche, pour faciliter la compréhension et surtout l’application de sa méthode – laquelle s’avère quand même relativement complexe avec, entre autres, un emboitement successif de profils, stratégies, tactiques, volets et angles – quelques grilles auraient été bienvenues.
Même si ce guide porte spécifiquement sur les relations difficiles au travail, les étapes ou pas-à-pas qu’il propose pourraient s’appliquer dans bien d’autres contextes de vie comme la famille ou les loisirs. Dans un billet précédent sur ce blogue, j’ai fait une recension de Dicocarrière de Dominique Clavier et Annie di Domizio. Cette nouvelle publication de Mathieu Guénette s’avère un bon complément à cet abécédaire.
Références
[1] Abordés dans divers épisodes de son balado Les ambitieux. [2] Posture en-dessous (ou soutenir) dirait-on en accompagnement quoique ne faisant pas l’unanimité du fait de son « agenda » caché.
* Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre.