En 2018, ont eu lieu à Marseille deux journées de rencontre autour du codéveloppement. Le codéveloppement fait des petits en Europe tant en organisations qu’en groupes autonomes.
Un congrès mondial de l’intelligence collective aura lieu en Provence en 2021 (http://www.vision-2021.fr/action/). L’intelligence collective peut être stimulée de différentes manières : constellations systémiques, thérapie sociale, théâtre-forum, danse-forum, théorie du U, multiples formes de counseling de groupe et organisationnel, etc. Le Québec sera représenté avec des présentations du Cercle de Legs et du codéveloppement.
Anticiper une situation prévisible, telle qu’une rupture annoncée d’équilibre professionnel, avec le codéveloppement professionnel, est-ce possible? Si oui, comment? Comment le codéveloppement peut soutenir un professionnel de la relation d’aide souhaitant prévenir l’usure de compassion (épuisement professionnel des aidants) et anticiper un maintien de son équilibre au travail?
Donnons un exemple de pratique autonome. Plusieurs membres du groupe sont allés à Montréal pour se former ou pratiquer le codéveloppement en contexte universitaire. Le processus de codéveloppement repose sur trois règles de base (confidentialité, authenticité ou parlé vrai, écoute et expression bienveillantes) et sur un dialogue collectif formalisé en six étapes successives (7 étapes en réalité avec le suivi):
Étape 1 : exposé de la situation et de la demande d’aide aux membres du groupe
Étape 2 : clarification de la situation via des questions posées par les participants
Étape 3 : contrat de consultation confirmant la demande ou précisant la demande
Étape 4 : préconisations, réactions, commentaires, suggestions des participants
Étape 5 : synthèse, plan d’action du membre demandeur et présentation du plan
Étape 6 : évaluation pendant laquelle chacun peut partager ses apprentissages
Illustration : un professionnel de la relation d’aide, disons un conseiller d’orientation, présente sa situation : son contexte professionnel est amené à changer. Le nombre de lieux d’intervention va augmenter et la charge de travail également, sans compensation pour réduire l’écart entre besoins des clients sur chaque site d’intervention et ressources disponibles pour y répondre. Il souhaiterait anticiper non seulement le risque évident d’épuisement professionnel mais surtout recueillir de nouvelles idées et même le maximum d’idées de ressourcement pendant le temps de travail pour maintenir un équilibre optimal.
Après diverses questions de clarification de la situation et du contexte de cette évolution (étape 2) posées par le groupe, le conseiller d’orientation maintient sa demande (étape 3).
À l’étape 4, le conseiller d’orientation reste silencieux et ouvert aux propositions formulées par les autres membres du groupe. Roberta suggère de viser l’objectif de pratiquer l’activité extra-professionnelle de prédilection du conseiller sur son temps de travail ou en dehors du temps de travail avec ses collègues et même de faire valoriser cette pratique dans ses milieux de travail. Tigran propose de pratiquer la méditation de pleine conscience autant que possible. Il préconise d’utiliser le crédit formation dans le cadre de la formation continue en ajoutant un investissement personnel si nécessaire. Jean partage son idée d’utiliser la physiologie de l’activité extraprofessionnelle du conseiller d’orientation, comme la respiration profonde, pour réduire le niveau de stress mais aussi pour ouvrir les potentialités. Christine suggère de laisser tomber la formation continue et comme piste de réflexion de continuer à travailler, de concevoir lui-même voire d’offrir lui-même la formation dont le conseiller aurait besoin pour se développer et s’équilibrer au travail. Stéphane recommande d’accepter la fatigue et de l’écouter pour mettre en place des règles d’hygiène de vie. Malika suggère d’améliorer les rapports avec les autres notamment avec l’autorité… Bref, après de nombreuses préconisations présentées il appartient au demandeur de faire le tri et une synthèse comprenant ses propres idées issues de ces préconisations avant d’établir son plan d’action.
À l’étape 5, le conseiller d’orientation retient un certain nombre d’actions qu’il souhaiterait mettre en place à court et à long termes comme l’acceptation de la fatigue, le fait d’accepter d’évoluer sur un continuum de fatigue, le développement de moyens d’expression, l’idée de cibler l’essentiel dans son travail, le fait de se demander ce qui absorbe le plus d’énergie dans sa façon de travailler, etc. Il établit son plan d’action et le présente au groupe.
Enfin, vient l’étape de l’évaluation de la séance. Il s’agit d’un retour sur les apprentissages. Roberta retient l’idée d’acceptation de l’ici et maintenant. Tigran a retrouvé ses propres interrogations dans cette séance. Jean a été touché par l’aspect pluridisciplinaire du groupe. Stéphane réinvestit l’idée de ne pas lutter contre la fatigue et se propose de s’interroger sur le sens de la fatigue. Christine se rappelle qu’il n’est pas toujours nécessaire de chercher des solutions ailleurs et que la puissance du groupe vient de la demande d’aide authentique.
Nous convenons d’une date pour la rencontre suivante. La rencontre a duré environ 1 h 30. À la fin de la rencontre suivante, l’animateur demande au conseiller d’orientation où il en est par rapport à son plan d’action. Le conseiller d’orientation a défini ce qu’il considère comme l’essentiel dans son activité professionnelle. Il développe une offre de formation pour répondre lui-même à son besoin. Il confie aussi que l’acceptation de la fatigue l’a conduit à l’acceptation du besoin de repos et des actes apparemment simples de faire des pauses régulières pendant le temps de travail et de bien se reposer en dehors du travail…
Des idées émergent concernant un codéveloppement systémique…
Références bibliographiques
Payette, A. et Champagne, C. (1997). Le groupe de codéveloppement professionnel. Presses de l’Université du Québec.
https://www.usherbrooke.ca/actualites/nouvelles/actualites/actualites-details/article/40126/
https://www.sherbrooke.ca/psychologie/recherche/publications/volume-5-no-2/