L’intervention en groupe visant la prévention de l’anxiété devant le choix de carrière
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L’intervention en groupe visant la prévention de l’anxiété devant le choix de carrière

Temps de lecture : 4 minutes

L’anxiété lors de l’adolescence n’est pas une problématique nouvelle, alors que les conseillères et conseillers d’orientation (c. o.) rencontrent des élèves vivant de l’anxiété de manière régulière. De fait, en 2017, 17,2 % des élèves du secondaire au Québec rapportaient un trouble anxieux diagnostiqué par une personne professionnelle de la santé (ISQ, 2018). Cette anxiété, déjà présente, a été affectée par la pandémie de la COVID-19. Depuis le début de la pandémie, plus du tiers des élèves du deuxième cycle du secondaire présenteraient des symptômes compatibles avec un trouble d’anxiété généralisée (4e secondaire : 37 %, 5e secondaire : 39 %); ce qui en fait un enjeu majeur de santé publique (Généreux et al., 2021).

Patricia Dionne a présenté à la conférence virtuelle Cannexus21 du CERIC, qui a attiré plus de 2 000 participants. Ne manquez pas l’appel aux conférenciers de Cannexus22, ouvert jusqu’au 3 juin 2021 et ainsi devenir conférencier au plus important congrès bilingue en développement et orientation de carrière au Canada. 
En contexte de choix de carrière, plusieurs facteurs peuvent contribuer à l’anxiété ressentie, notamment la transition à venir vers les études postsecondaires. Cette anxiété peut être accentuée par le fait que les élèves ont de nombreux choix à faire dans un court laps de temps à la fin de leurs études secondaires (Cournoyer et al., 2016), d’autant plus que la responsabilité de ces choix repose en grande partie sur leurs épaules. En outre, l’insuffisance ou l’inégalité d’accès à des ressources professionnelles en orientation en milieu scolaire (Dionne et coll., 2018) peut limiter le soutien pouvant être offert aux élèves vivant de l’anxiété devant leur choix de carrière. La pandémie a également contribué à alimenter cette anxiété. Une enquête menée par Academos (2021) révèle que 42 % des jeunes au Québec rapporteraient être plus anxieux à l’égard de leur choix de carrière. Le rapport met également de l’avant le fait que les structures sociales permettant aux jeunes de réfléchir à leur choix de carrière, par exemple des rencontres avec une ou un c. o., ont été moins accessibles durant la pandémie.

Dans le cadre d’une thèse de doctorat, nous travaillons à l’implantation d’un programme d’intervention en petit groupe pour prévenir l’anxiété en contexte de choix de carrière chez les élèves de 4e et 5e secondaire. Les petits groupes sont formés de 6 à 8 personnes participantes, et incluent un total de 12 heures d’intervention durant lesquelles des outils sont transmis par rapport à la maîtrise des émotions et au processus de choix de carrière. Plusieurs groupes ont été implantés à cet effet à partir de janvier 2020, et les résultats préliminaires indiquent que l’intervention en petit groupe dans ce contexte peut avoir un impact positif sur les personnes participantes.

En effet, les personnes participantes rapportent que l’apport du groupe a été précieux. Elles mettent de l’avant que le groupe et les discussions qui y ont été menées ont eu des effets bénéfiques sur leur anxiété de performance et la pression ressentie à l’égard du choix de carrière.

Le groupe a également été une occasion pour les personnes participantes de réaliser qu’elles n’étaient pas les seules à vivre de l’anxiété.

Comme le souligne l’une des participantes : « Je voyais que comme, les filles admettons, elles avaient des solutions à elles-mêmes. Je voyais admettons, ah bien Alexia1, elle a cette inquiétude-là, Zoé, elle, en a une, ah ! bien, regarde ! ça se ressemble, on n’est pas toutes seules. Regarde ! on va apprendre à comme, passer par-dessus [notre anxiété]… »

L’intervention en groupe visant la prévention de l’anxiété devant le choix de carrière

Le fait de participer au groupe permet également aux jeunes de se mettre en action pour avancer dans leur processus de choix de carrière, ce qui peut être plus difficile dans les conditions actuelles. Par rapport à la recherche d’information pour déterminer un choix de carrière, une participante dit ceci : « En fait, le groupe m’a poussée à le faire, parce que, de moi-même, je ne l’aurais pas fait. » En ce sens, un devoir était donné entre deux rencontres, et du temps a également été accordé au sein du groupe pour aller consulter des sites pertinents, notamment Repères et les sites des cégeps et universités.

Le fait que l’intervention se déroule en groupe est également vu comme un aspect positif par les personnes participantes, qui mentionnent qu’il leur a été possible de créer des liens de cette façon.

Une participante dit : « Je repars aussi en connaissant mieux des gens avec qui, oui, j’avais parlé, mais comme là, en ayant créé le groupe, bien, je trouve que ça a comme vraiment, tu sais… c’est un lien dont on va se souvenir quand même longtemps, qu’on a fait ça toutes ensemble. »

L’anxiété étant répandue chez les jeunes au Québec, encore plus dans le contexte actuel, il est nécessaire de se pencher sur la façon dont il est possible d’intervenir en tenant compte de cette problématique. L’intervention en groupe semble être une avenue intéressante à considérer, alors qu’elle a plusieurs retombées positives sur les personnes participantes, notamment pour normaliser l’anxiété ressentie, ou leur offrir un soutien dans leur processus de choix de carrière.

Références

Academos (2021). Impact de la pandémie sur le choix de carrière des étudiants québécois et canadiens. Repéré à https://academos.lpages.co/pandemie/.

Cournoyer, L., Lachance, L., et Samson, A. (2016). L’action décisionnelle de carrière: processus en deux dimensions, quatre tensions. Dans J. Masdonati, M. Bangali, & L. Cournoyer (édit.), Éducation et vie au travail: perspectives contemporaines sur les parcours et l’orientation des jeunes (p. 119-145). Les Presses de l’Université Laval.

Dionne, P., Viviers, S., Picard, F., et Supeno, E. (2018). Orientation pour tous au secondaire public: mythe ou réalité au Québec. Revue de l’éducation de la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa, 5(3), 2-7.

Généreux, M., Dallaire, J.-S., Haichin, K., et Leflej, N. (2021). Dévoilement des premiers résultats de l’Enquête sur la santé psychologique des 12-25 ans. Communication présentée au webinaire « Santé mentale en Estrie ».

ISQ (2018). Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2016-2017. Résultats de la deuxième édition. Québec, QC: Institut de la statistique du Québec.


Note

1 Les prénoms utilisés sont des prénoms fictifs. 


 

Audrey Dupuis est conseillère d’orientation et doctorante en éducation à l’Université de Sherbrooke. Ses recherches portent principalement sur le choix de carrière lors de l’adolescence, l’anxiété associée au choix de carrière et le counseling de carrière groupal. Patricia Dionne est professeure agrégée au Département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke. Ses recherches portent principalement sur l’intervention en groupe auprès d’adultes et de jeunes en situation de vulnérabilité ou de transition, selon une perspective de justice sociale.
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Audrey Dupuis est conseillère d’orientation et doctorante en éducation à l’Université de Sherbrooke. Ses recherches portent principalement sur le choix de carrière lors de l’adolescence, l’anxiété associée au choix de carrière et le counseling de carrière groupal. Patricia Dionne est professeure agrégée au Département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke. Ses recherches portent principalement sur l’intervention en groupe auprès d’adultes et de jeunes en situation de vulnérabilité ou de transition, selon une perspective de justice sociale.
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