Pour parler d’orientation et de développement de carrière, nous, professionnels dans ce domaine, faisons fréquemment référence à une zone de transition scolaire ou professionnelle.
Cette transition fait généralement suite à une prise de décision qui s’achève ou est interrompue pour une raison ou pour une autre. Le changement est visible dans l’espace et le temps par la personne concernée et son entourage. L’élève a changé de filière, de classe ou d’établissement scolaire. Il est allé en apprentissage ou en emploi. L’apprenti est revenu à l’école. Il a changé de métier ou il s’est inséré professionnellement. Idem pour le stagiaire de la formation continue. Le salarié a changé de poste, d’emploi, de secteur d’activité. Ce changement implique une période d’adaptation et un processus d’acculturation. L’acculturation sera double en cas de primo-insertion professionnelle, c’est-à-dire s’il y a une première transition du monde de la formation vers le monde du travail. Autrement dit, le ou la jeune devra faire siennes les règles du jeu qui régissent le monde du travail en général et celles plus spécifiques concernant son lieu de travail, son activité ou son métier. En cas d’orientation, de réorientation ou de reconversion, l’acculturation concernera plus spécifiquement la filière ou l’activité choisie. En effet, les codes généraux du monde de la formation ou du monde du travail auront été acquis précédemment. Mais ce serait une grave erreur de croire que les codes généraux du monde de la formation sont les mêmes que ceux du monde du travail. Cette erreur est actuellement souvent commise par les milléniaux.
Le maintien inadapté d’une décision peut conduire un client à l’épuisement professionnel ou à l’autre extrême à l’obsolescence (comme une forme ou une autre de démission psychologique). Le maintien adéquat d’une décision mobilise une bonne quinzaine de stratégies dynamisantes.
Par conséquent, une personne qui n’est pas en transition, qui ne fréquente donc pas la zone de transition, ce qui revient à fréquenter la zone de maintien, a beaucoup à gagner, et son organisation aussi, à faire régulièrement le point sur son maintien scolaire ou professionnel.
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- S’occuper du maintien signifie prendre en main la prévention des risques systémiques d’épuisement et d’obsolescence.
- S’occuper du maintien implique aussi d’offrir d’intervenir pour permettre aux clients d’actualiser leur cap entre les deux risques cités précédemment.
- S’occuper du maintien, c’est permettre aux clients de faire régulièrement le point pour qu’ils ou elles puissent choisir, mettre en place ou à jour leurs stratégies de maintien scolaire ou professionnel.
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Dans le milieu scolaire, c’est une approche systémique qui favorise la persévérance scolaire. L’approche individuelle reste insuffisante. L’approche de la carotte et du bâton restent inadéquates. Une école qui se perd dans les exigences du monde du travail n’est plus une école dynamique. Une école qui se perd dans les exigences d’un individu n’est plus une école au service de la société. Une école doit pouvoir être ouverte et fermée. C’est ce qui en fait sa complexité.
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- L’école doit d’abord être un lieu de vie : un milieu où la vie (et l’avis) des jeunes peut s’exprimer ici et maintenant et être prise en compte ici et maintenant.
- L’école doit être un lieu ouvert sur l’avenir : un milieu où la vie (et encore l’avis) des jeunes peut être projetée de façon originale et positive dans le futur.
- L’école doit être un autre lieu de vie pour les jeunes : un milieu où leur vie peut être bien différente de la vie en famille, de la vie dans leur quartier et de la vie au travail; un milieu où ils ont un espace de sécurité, un milieu où ils peuvent prendre le temps d’apprendre et travailler à leur rythme.
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Par exemple, un élève décrocheur que l’on tente de maintenir à l’école en l’envoyant faire stages sur stages en dehors de l’école pourra en tirer un grand bénéfice à court et à long termes à condition qu’il y trouve un gain personnel. Ce bénéfice peut être organisé par l’école pour que l’élève y gagne en connaissance de soi, en confiance et estime de soi. Ce bénéfice rejaillit sur le groupe, sur la classe et sur l’établissement scolaire. C’est précisément cette connaissance de soi, cette confiance et cette estime de soi qui serviront de point d’appui à des stratégies de maintien dynamisantes reliées au vécu de l’élève.
Un travailleur devrait pouvoir reprendre une formation à tout moment pour évoluer, se développer, se reconvertir ou se maintenir professionnellement.
Dans ce dernier cas, il s’agit clairement d’une stratégie de maintien. Et entreprendre une formation pour se développer, ce peut être encore une stratégie de maintien! Ainsi, la formation doit pouvoir trouver sa place évidemment au début de la vie, mais aussi au milieu de la vie et même à tout moment sans culpabilité.
Un étudiant devrait pouvoir s’insérer sur le marché du travail à tout moment pour revenir plus tard aux études sans que cette démarche soit dévalorisée, voire empêchée. Une stratégie de maintien peut s’inscrire dans le long terme.
L’école, par essence, s’inscrit dans une logique éducative. Pour cela, elle doit conserver son identité. Ni soumise à l’individualisme ni soumise au monde du travail, l’école doit naviguer entre et avec ces deux cultures sans s’y confondre. Tout jeune devrait pouvoir y construire son projet scolaire, professionnel et existentiel.
* Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre.
Références