1ère consultation en counseling de carrière : un acte héroïque
Ressources et formations

1re consultation en counseling de carrière : un acte héroïque

Temps de lecture : 4 minutes

 

Consulter en orientation et en développement de carrière s’inscrit dans un rythme propre à chacun interagissant avec son environnement. La première consultation résulte d’une combinaison entre une prise de décision connectée à un besoin d’aide et à un soutien ou une influence ou à une stimulation externe (information, conseil, rencontre, opportunité, etc).

Jadis, mon niveau d’estime personnelle était tellement faible que je répugnais à demander de l’aide. Sur le plan professionnel, j’accédais à des emplois qui me confrontaient à cette vision de moi-même. Prendre le risque de m’exposer au regard de l’aidant me faisait peur, honte et même horreur. Je baignais depuis toujours dans un climat de honte, un sentiment de culpabilité, et je me remémorais continuellement ma mauvaise image et mes mauvaises actions.

Mon imagination était négativement fertile. Ainsi, l’idée de consulter pour m’en sortir était inenvisageable. C’était un défi bien trop grand. Mes pensées erronées et mes croyances non constructives représentaient les premiers obstacles à surmonter pour oser consulter.

Fort de cette expérience, j’accorde une attention particulière aux clients pour lesquels consulter est un défi.

Quels sont les cycles, les étapes, les avantages pour les clients et les intervenants de reconnaître les cycles et les étapes d’une première demande d’aide?

 

Certains clients sont à l’aise avec le fait de demander de l’aide. Pour d’autres, il est important pour la suite du processus qu’ils se sentent validés et valorisés dans le fait de demander de l’aide et d’oser consulter. Il s’agit parfois d’une action courageuse, héroïque et même d’une victoire sur leur impuissance apprise, sur leur anxiété, sur leurs croyances non constructives et sur leur faible estime de soi. Nous pouvons aller jusqu’à valoriser le besoin d’aide et la démarche de consultation pour mobiliser la dynamique adaptative du client.

Imaginez tout le potentiel de résolution et de développement psychosocial qui réside dans la force et la fragilité d’un besoin d’aide qui va à la rencontre d’un inconnu pour la première fois. Cette action de consulter, une réalisation en soi, représente une étape déterminante dans un processus qui a peut-être commencé il y a des semaines, des mois ou des années.

L’étape initiale aura pour but de créer une alliance de travail tout en déclenchant un processus de questionnement et de réflexion. L’étape suivante aura pour objectif de soutenir le lien et le processus de réflexion en marche. La troisième étape sera l’occasion d’accompagner, d’encourager et de soutenir son action, puis de clôturer l’accompagnement.

Cette action victorieuse pour certains clients représente une ressource à refléter. La capacité à demander de l’aide quand cela est nécessaire est une compétence psychosociale faisant partie des compétences à s’orienter. Ainsi, ce premier facteur de protection (appelé incitatif par Egan) peut être mobilisé et renforcé par l’intervenant en counseling de carrière.

Imaginez ce que certains clients ont dû braver et dépasser pour décider de prendre rendez-vous, de venir au rendez-vous et éventuellement de s’ouvrir durant la consultation.

Demander de l’aide n’est pas un acte anodin. Demander et accepter humblement de recevoir de l’aide est une affaire d’ouverture. Ensuite, valider l’expérience subjective et valoriser le passage de l’intention à l’action est le cœur même du processus de counseling de carrière. Ce processus est fondé sur un besoin de croissance. Ce passage d’un stade de développement à un autre réclame une présence de l’intervenant. Ce passage constitue peut-être le processus de résolution, le processus créateur d’options, processus transférable tout au long du counseling de carrière et transposable tout au long de la vie.

Pour certains clients, le fait de demander de l’aide représente une remise en question personnelle. Chez des clients potentiels, ne pas se sentir dignes du regard de l’autre peut conduire, et probablement conduit, à ne pas consulter parce qu’il est difficile d’exposer une image négative de soi ou parce que des croyances nuisibles les en empêchent. Parfois, certaines représentations de la relation d’aide produisent une induction de rôle. Il est aussi possible pour certains clients de se sentir indignes de recevoir une aide de qualité, quelque chose de bon, un regard positif, une intervention nourrissante, bienveillante, chaleureuse.

Parfois un client a réussi à prendre la décision de se faire aider, mais la formulation de la demande d’aide émergera des semaines, voire des années plus tard. D’autres fois, le client vient au rendez-vous, mais une aide significative ne peut être reçue à ce moment-là sans aborder préalablement les protections, les résistances, l’induction de rôle dont il est l’objet.

 

La validation de la demande d’aide du client ainsi que la valorisation du fait de consulter un intervenant en orientation et en développement de carrière peuvent produire une ouverture et peuvent représenter une victoire pour le client. Il s’agit d’une première « célébration » de sa victoire. Cette célébration contribue à son processus de croissance, soutient son estime personnelle, son sentiment de fierté, sa confiance en soi, la légitimité de son besoin de reprise de pouvoir sur sa vie personnelle et professionnelle. Cet acte héroïque de nos clients lorsqu’il est reconnu et valorisé peut favoriser une ouverture au changement. Cette ouverture au changement représente un tremplin vers une nouvelle victoire sur soi pouvant conduire vers une autre réussite et une autre encore (effet « étendu »). De petites réussites en petites réussites personnelles et professionnelles, le niveau d’anxiété diminue pendant que les niveaux d’espoir et d’estime de soi augmentent petit à petit, un pas après l’autre, en direction d’une orientation et d’un développement de carrière dynamiques.

 

* Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre

Psychologue de l’éducation nationale spécialisé en éducation, développement et conseil en orientation scolaire et professionnelle, Laurent exerce en France dans un centre d’information et d’orientation. Depuis 20 ans, il accompagne tout type de public notamment les scolaires. Il a passé une année en qualité d’étudiant au Département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke pour peaufiner ses compétences opérationnelles. Il mesure chaque jour la portée transculturelle d’un counseling au service de l’orientation et du développement de carrière. Il partage son expérience de l’accompagnement via l’écriture et la formation.
×
Psychologue de l’éducation nationale spécialisé en éducation, développement et conseil en orientation scolaire et professionnelle, Laurent exerce en France dans un centre d’information et d’orientation. Depuis 20 ans, il accompagne tout type de public notamment les scolaires. Il a passé une année en qualité d’étudiant au Département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke pour peaufiner ses compétences opérationnelles. Il mesure chaque jour la portée transculturelle d’un counseling au service de l’orientation et du développement de carrière. Il partage son expérience de l’accompagnement via l’écriture et la formation.
Latest Posts
  • Cybervaleurs : mon assistant virtuel
  • Éclairer ses choix tech-tech pour accompagner les transitions
  • Retour vers le futur de la formation initiale et continue
  • Goutte d'huile et grain de sable