« L’implication sociale et le travail peuvent exercer une grande influence sur la santé, la qualité de vie et le rétablissement des personnes atteintes d’un trouble mental », stipule le Plan d’action en santé mentale 2015-2020 du Québec.
Marché du travail

Le travail : facteur de rétablissement ou source d’enjeu de santé mentale?

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« L’implication sociale et le travail peuvent exercer une grande influence sur la santé, la qualité de vie et le rétablissement des personnes atteintes d’un trouble mental », stipule le Plan d’action en santé mentale 2015-2020 du Québec.

Pourtant, les cas d’épuisement professionnel, de détresse psychologique, d’anxiété et de stress au travail touchent une grande partie de la population1 et semblent de plus en plus présents. Les conditions de travail ne semblent pas toujours favorables à une bonne santé mentale.

Quel est l’impact réel du travail sur la santé mentale? Ce dernier a connu plusieurs changements au niveau de ses modalités dans les dernières années, notamment à la suite de la pandémie. Mais pour qu’il reste un facteur de rétablissement, devrait-on en tant que société repenser le concept même de l’emploi?

Le travail comme facteur de rétablissement 

Le travail est depuis plusieurs années reconnu comme étant l’un des facteurs de rétablissement principaux en santé mentale, rétablissement envisagé comme le réengagement dans une vie active et sociale2. De nombreuses études, menées principalement dans les années 1980 et 1990, ont démontré son impact positif sur les personnes présentant des enjeux de santé mentale. Le rétablissement dépend en effet de la dynamique entre des conditions internes et externes à la personne3. Parmi ces conditions externes, on trouve, en plus d’un accès au logement et à des liens sociaux positifs, la possibilité d’exercer un travail. L’emploi permet de reprendre en main sa vie et d’envisager un futur favorable. Il constitue le principal véhicule d’inclusion dans la société (Dorvil et al. 1997).

C’est d’ailleurs sur ce fondement qu’a été créé en 1988 Accès-Cible SMT (ACSMT), qui voit celui-ci comme la pierre angulaire de l’équilibre et de la réinsertion. Depuis plus de 35 ans, de nombreux témoignages d’anciens participants abondent dans ce sens.

« Aujourd’hui, malgré mon enjeu de santé mentale, j’ai un emploi qui me rend fière, épanouie, confiante… en un mot, satisfaite! », affirme une personne qui a fait le programme de préparation à l’emploi (PPE) en 2021.

Selon Geneviève Leduc, pair-aidante chez ACSMT et formatrice au Centre d’apprentissage Santé et Rétablissement (CASR), les dimensions principales favorisant le rétablissement par le travail concernent l’identité de la personne, autant l’identité personnelle (estime de soi, confiance, sentiment de normalité, vie équilibrée, capacité d’autonomie, etc.) que l’identité sociale (sentiment d’appartenance et d’inclusion, bris d’isolement, participation citoyenne).

Le travail, source de trouble de santé mentale

Toutefois, on le voit de plus en plus, les contextes et les conditions de travail ne sont pas toujours favorables au maintien d’une bonne santé mentale. Au Québec, 25% des travailleurs affirment ressentir quotidiennement un stress élevé. Dans certains milieux, la proportion atteint 50%.

Le monde du travail est souvent marqué par une culture de surproductivité, de « surperformance », d’efficacité maximale, qui peut être source de stress et d’anxiété. Les chiffres parlent d’eux-mêmes, les cas d’épuisement professionnel sont de plus en plus nombreux.

De plus, la stigmatisation et les préjugés qui entourent les problèmes de santé mentale sont encore très présents dans de nombreux milieux. Peur de représailles, de se faire juger par des collègues, ou de se faire discriminer, se sentir trop vulnérable… Les employés vont souvent éviter de partager leurs enjeux et de demander de l’aide, et les gestionnaires n’aborderont pas le sujet de leur propre santé mentale.

Pourtant, 49 % des employés de PME interrogés dans une récente enquête de l’Université Laval ont rapporté vivre avec un trouble de santé mentale ou d’abus de substances.

Facteur de rétablissement, oui mais…! 

Le travail ne peut donc pas être systématiquement considéré comme un facteur de rétablissement. De nombreuses conditions et circonstances entrent en jeu pour que ce soit le cas.

Bien sûr, une partie de la responsabilité du bien-être de l’employé appartient à l’individu lui-même. C’est d’ailleurs sur ces aspects que l’on travaille avec les participants dans le cadre de notre PPE. Il s’agira notamment d’apprendre à mieux se connaître pour être capable d’identifier ses propres besoins et les exprimer, à poser ses limites, reconnaître ses symptômes, réguler ses émotions et ses enjeux relationnels, gérer les conflits, faire des choix qui reflètent sa personnalité et ses besoins, etc.

L’employeur a aussi un grand rôle à jouer. Il est tenu d’offrir un milieu de travail psychologiquement sain, exempt de harcèlement.

Le sens que chacun donne au travail est et restera bien sûr différent d’une personne à l’autre, mais un changement devrait peut-être avoir lieu de façon plus globale, afin qu’il touche l’ensemble du monde du travail. La société, de façon générale, est concernée et devrait être impliquée.

« C’est par une mobilisation collective (décideurs, employeurs, professionnels concernés, dispositifs de soins et d’accompagnement, associations), que la santé mentale au travail sera mieux prise en compte et que les regards évolueront sur ces problématiques. » déclare Estelle Saget de l’organisme public français d’information sur la santé mentale Psycom4.

Avec la crise écologique et les prises de consciences des enjeux de surconsommation, la culture de la productivité à tout prix est en train d’évoluer. La pandémie a créé une recrudescence des symptômes des enjeux de santé mentale chez une majorité de la population. Ces enjeux deviennent dès lors un peu moins tabous, et la parole a commencé à se libérer. Le contexte de plein emploi permet aux employés d’être plus exigeants quant à leurs demandes. Les jeunes n’envisagent plus le travail de la même façon que les générations antérieures.

L’ensemble de ces facteurs semble être un contexte favorable à une évolution de la vision du travail dans notre société.

Peut-être est-ce le bon moment pour commencer à envisager, tous ensemble, le travail autrement, de façon innovante, afin qu’il soit et reste un élément positif dans la vie de chacun!

 

* Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre.

_______________________

1 https://www.osmet.umontreal.ca/flash-recherche-levolution-des-indicateurs-de-sante-mentale-dans-les-trois-premiers-cycles-de-lelosmet/

2 Il existe plusieurs conceptions et définitions du rétablissement en santé mentale. http://www.douglas.qc.ca/info/retablissement-sante-mentale

3 (Lauzon, G. & Lecomte, Y. (2002). Rétablissement et travail. Santé mentale au Québec, 27(1), 7–34. https://doi.org/10.7202/014537ar).

4 https://www.psycom.org/comprendre/la-sante-mentale/la-sante-mentale-et-lemploi/

Forte de plus de 20 ans d’expérience en communication, Laurence a su se démarquer par son engagement envers des missions à forte valeur sociale. Au fil des années, elle a développé une expertise dans l’art de sensibiliser et de mobiliser des publics autour de causes sociales qui lui tiennent à cœur. Elle œuvre depuis plus de 5 ans à promouvoir la santé mentale et favoriser l’insertion socio-professionnelle des personnes ayant un enjeu de santé mentale.
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