Les retraités, une nouvelle clientèle pour les C.O.
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Les retraités, une nouvelle clientèle pour les C.O.

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Je ne vous apprends rien en vous disant qu’un pourcentage élevé de la population active est en transition vers la retraite ou est à la retraite. Et, je ne vous apprends rien en vous disant que, pour un pourcentage assez élevé de personnes, la décision de prendre la retraite est difficile. Mais, ce vers quoi j’aimerais diriger vos réflexions est que cette population représente une clientèle grandissante pour les conseillères et les conseillers d’orientation. 

 Il existe déjà plusieurs écrits et programmes d’accompagnement à la retraite. Nous n’avons qu’à penser au Cercle de legs offert par Diane Doyon ou au livre de Jacques Limoges, Le Quatrième tiers, et à ceux de Nancy Schlossberg, Tamara Erickson, aux États-Unis, ou du Québec, Marie-Paule Dessaint. Nous retrouvons beaucoup de programmes de préparation à la retraite souvent centrés sur les questions financières. Nous retrouvons beaucoup moins de programmes post-retraite, si je peux m’exprimer ainsi. Et encore moins, des accompagnements individuels à l’extérieur des grands centres urbains. 

Une raison qui expliquerait cette lacune, à mon avis, est la méconnaissance de la part des conseillers et des conseillères de la retraite. D’abord, la définition même du mot « retraite » n’est pas bien compriseGénéralement, nous devons faire la distinction entre la « retraite d’un emploi » et la « retraite du marché du travail ».

Je reviendrai plus tard sur cette deuxième signification.  

Lorsqu’un individu dit « je suis retiré », il ou elle parle généralement de la retraite d’un emploi. C’est-à-dire, qu’il ou elle a atteint l’âge de pouvoir quitter son emploi et de retirer sa pension avec ou sans pénalité selon les conditions. Ceci peut survenir à l’âge de 55, 60, 66 ans ou plus et est généralement connu bien à l’avance. Je dis généralement, parce que cela n’est pas toujours le cas. Prenez par exemple, l’individu dont l’employeur a fermé boutique et a mis les employés à pied forçant certains à « prendre leur retraite » ou l’employeur qui, à cause de compressions budgétaires, a fermé des postes et a « offert » des « paquets de départ à la retraite ». 

Nous nous entendons généralement pour dire que la retraite est une transition, par conséquent, comme tous les évènements-transitions de la vie, la transition à la retraite possède un avant, un moment dans le temps et un après. Et, comme les autres transitions, celle-ci est irréversible. Une fois que la retraite est prise, on ne peut pas revenir dans le temps. On peut faire des changements, mais on ne peut pas revenir. Les transitions sont bien connues des conseillères et des conseillers, plusieurs définissent même leur profession comme l’accompagnement dans les transitions. 

Il existe une multitude de scénarios de transition à la retraite qui se valent tous les uns les autres.
Lorsqu’un individu prend sa retraite et s’engage dans un nouvel emploi, qu’il soit à temps plein régulier, à temps partiel ou à contrat, nous devrions parler de « retraite d’un emploi » et non du marché du travail. C’est à cela que Jacques Limoges réfère lorsqu’il parle du « quatrième tiers » ou, dans les termes de Riverin-Simard, ces gens n’ont pas quitté la planète « travail ». J’ai rencontré plusieurs personnes qui prenaienleur retraite de leur emploi précisément parce qu’elles avaient reçu une offre d’un autre employeur. J’ai rencontré des gens qui travaillent pour le même employeur, mais comme contractuel, comme remplaçant ou à temps partiel. Combien de professionnels quittent leur emploi et prennent un poste d’enseignant dans le même domaine. Les collèges et les universités dépendent beaucoup de ces personnes.  

D’autres quittent leur emploi et en prennent un nouveau dans un secteur différent. Bien souvent, ils choisissent un emploi qui répond mieux à leur besoin. J’ai rencontré un monsieur qui était vendeur pour une grande compagnie, un emploi très stressant, et qui, après sa retraite, a pris un emploi « d’accueilleur » dans un magasin de grande surface. Une personne très sociale, il était très heureux de simplement accueillir les clients et de répondre à leurs questions. J’ai croisé un autre professionnel qui a pris sa retraite d’une agence gouvernementale et qui est allé travailler pour une firme qui soumissionnait à cette même agence. 

Je place dans ce groupe, les individus qui prennent leur retraite de leur emploi et qui lancent leur propre entreprise ou qui continuent à « brasser des affaires ». Il me vient à la mémoire, l’enseignant qui après avoir pris sa retraite entreprit l’exploitation d’une ferme ou celui qui commença une maison d’édition de livres ou celui qui s’associa avec son fils dans une entreprise de peinture de maisons. Les exemples de ce genre sont nombreux. 

Tous ces scénarios de retraite de l’emploi sont valables et intéressants. Ce qu’ils ont en commun c’est la continuité de revenu. Ce qui les distingue ce sont les paramètres de décision, c’est-à-dire leur potentiel de procurer le bonheur. On peut reconnaître que la continuité de revenu est un aspect positif, tandis que la diminution de flexibilité dans la gestion du temps est un aspect négatif. Il est certain que pour les employés qui n’ont pas un très bon régime de retraite ou, pire, qui ont perdu leur plan de retraite à l’occasion de la fermeture de l’employeur, ce paramètre est important. Comme nous le savons, la carrière nous apporte beaucoup plus que le simple revenu.

J’avance, comme hypothèse, que la possibilité de répondre à nos besoins fondamentaux détermine grandement la décision de prendre sa retraite. 

J’avance que la « retraite du marché du travail » se produit lorsque l’individu décide de se départir du revenu d’emploi, mais aussi des autres moyens de répondre à ses besoins que lui procurent l’emploi. Pensons à la gestion du temps, aux relations interpersonnelles, au sentiment d’accomplissement, à la reconnaissance sociale. Ce que j’appelle la retraite de l’emploi et la retraite du marché du travail n’est pas une question de « un ou l’autre ». Il n’est pas rare qu’un individu, même s’il est retiré du marché du travail, aille travailler de façon rémunérée quelques heures par-ci, par-là. Il s’agit donc d’une transition entre la retraite de l’emploi et la retraite du marché du travail. 

La famille et la communauté jouent des rôles importants dans la transition à la retraite. J’ai rencontré plus d’un retraité ou une retraitée pour qui les responsabilités familiales étaient déterminantes dans leur décision de prendre leur retraite. Également, bien des retraités se tournent vers le bénévolat et l’activité communautaire pour combler leur besoin de socialisation, de satisfaction et de sens à la vie. Et avec la retraite vient l’inévitable vieillissement. En avançant en âge, la gestion de sa condition physique, de sa nutrition et de sa santé physique et psychologique prend de l’importance. On peut donc voir que la transition à la retraite ne va pas de soi, qu’elle demande toute une gestion qui peut avoir des hauts et des bas. 

Si vous ne l’avez pas déjà reconnu, oui, je suis retraité du marché du travail. Et oui, je suis satisfait de ma transition. Par contre, au travers de mes activités, je rencontre des personnes qui me semblent avoir de la difficulté à gérer leur retraite et pour qui un accompagnement serait le bienvenu. Ces jours-ci, les gouvernements et différentes organisations ou associations produisent des études et des rapports portant sur les stratégies de vieillissement, ou sur l’accompagnement des aînés, sur des communautés amies des aînés, etc. Il me semble que des conseillers qui accompagnent les individus dans leur transition à la retraite auraient leur place. Ce serait important pour les individus, mais aussi pour les organisations qui font appel aux bénévoles, aux agences gouvernementales qui offrent des services et même aux employeurs qui pourraient faire appel aux retraités. 

Si je voulais lancer un service de consultation, je considèrerais certainement cette clientèle. Alors, si la question vous intéresse, je vous invite à me contacter. Selon moi, le premier pas serait de développer un questionnaire d’auto-évaluation de sa situation. 

 

Ce texte a été publié initialement sur OrientAction le 4 mars 2019.
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