Une intervention basée sur la théorie de l'autodétermination (TAD)
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Une intervention basée sur la théorie de l’autodétermination (TAD)

Qui d’entre nous n’a pas rencontré une cliente ou un client en partie ou totalement dépossédé de son pouvoir d’agir, par exemple dans la décision et l’acte de venir consulter? 

Les clientes et clients qui ont le contrôle de leur décision et de l’acte de consulter gagnent également à bénéficier de cette approche en développement de carrière basée sur la TAD.  

Une mère et sa fille, élève en dernière année de DEC (Terminale bac en France), se présentent à leur rendez-vous au cégep (lycée en France). La maman expose une demande d’information sur les écoles post-DEC, en employant le « On ». Nous demandons à sa fille son point de vue (recherche de collaboration avec la principale intéressée). La maman répond à sa place (option de contrôle). Elle tourne son regard vers sa mère (indice somatique de motivation extrinsèque). Nous demandons à nouveau son point de vue à sa fille. Elle tourne son regard vers sa mère (confirmation du premier indice somatique). « Qu’attendez-vous de ce rendez-vous mademoiselle? ». Ses yeux se dirigent vers sa mère (changement de climat au sein de la rencontre car la motivation extrinsèque saute aux yeux). La mère dit que sa fille est timide. Nous demandons son point de vue à sa fille sur cette dite timidité. Ses yeux s’humidifient. Elle répond que sa mère aussi est timide. Nous abordons cette question de timidité dans la famille sans trop nous étendre puis le motif de ce rendez-vous selon cette jeune femme. Elle ne sait pas. « Comment se passe un entretien au service d’orientation d’après vous? ». Elle ne sait pas. Elle dirige son regard vers sa mère (l’indice de motivation peut faire penser à un besoin d’appartenance ou d’attachement selon la théorie à laquelle l’intervenant se réfère). « Souhaitez-vous discuter ici de votre idée d’études? » (recherche de sa zone de pouvoir, autrement dit de son sentiment d’autonomie). « Non » (affirmation de son besoin d’autonomie). « Votre fille ne souhaite pas discuter de son orientation ici ni même être ici ». « Je sais » répond la maman. À la fille : « Puisque vous êtes ici, avec quoi aimeriez-vous partir? ». Pas de réponse (son silence est parlant et sa réponse non verbale sous forme de mimique est parfaitement claire). « Vous ne souhaitez donc pas en discuter ici, c’est bien ça? » (validation de son sentiment d’autonomie). « C’est ça ». Avec qui en discutez-vous? » (sondage du besoin d’appartenance). « Avec ma mère et avec mes copines de classe » (expression du besoin d’appartenance). « Pour le moment vous avez envie d’en discuter avec votre mère et avec vos copines de classe et cela vous suffit (sentiment d’autonomie), c’est bien ça ? ». « Oui ». 

Tentative de soutien à l’autonomie : « Il semblerait que votre fille ait toute confiance en vous (appartenance) et qu’elle souhaiterait poursuivre le dialogue (compétence) avec vous (autonomie), du moins pas en dehors de vous et de ses copines de classe (appartenance) ». 

L’entretien se focalise sur les besoins de la maman. Nous convenons de traiter le but suivant : comment accompagner sa fille? Nous abordons ses doutes sur ses capacités parentales d’accompagner sa fille (compétence), ses peurs de l’induire en erreur et nous pointons des ressources : capacité à maintenir un lien de confiance (besoin d’appartenance), capacité à faire s’exprimer et réfléchir sa fille (compétence), capacité à demander de l’aide pour mieux aider sa fille (besoins d’autonomie, de compétence et d’appartenance), etc. 

Plus tard, la maman demande : « Ma fille ne veut pas faire de recherche seule. Il faut que je sois à côté d’elle (tension entre besoins de base). Comment faire pour qu’elle fasse seule ses recherches? ». Nous discutons l’idée de demander à sa fille de faire une recherche de 10 minutes sur une question précise, par exemple un calendrier des journées Portes ouvertes dans telle ville, puis de renouveler l’expérience. Elles valident l’idée toutes les deux. La rencontre mobilise la motivation de la maman à soutenir maintenant l’autonomie de sa fille.  

Mère et fille sont gagnantes lorsque le soutien à l’autonomie est privilégié.
Dans ce cas, une stratégie systémique basée sur la TAD renforce l’accompagnement de carrière. La frustration des besoins d’autonomie, de compétence, d’appartenance oriente les individus vers une motivation extrinsèque et inversement leur satisfaction les conduit vers une motivation intrinsèque, qui elle, apporte bien-être et persévérance dans la poursuite de ses objectifs. 

Pourquoi les buts changent en cours de route? Ils peuvent changer parce que l’intervenante ou l’intervenant, selon son style motivationnel, aide la personne à choisir des buts plus ou moins reliés à ses besoins psychologiques de base comme l’autonomie, la compétence et l’appartenance (connexion, attachement, relation, affiliation). L’augmentation de la concordance entre buts à atteindre et besoins de base contribue au passage d’un stade de développement à un autre et à l’accomplissement de soi, deux finalités du counseling. 

 

Références bibliographiques 

Deci, E. L. et Ryan, R. M. (2002). Self-Determination Theory (SDT). En français Théorie de l’autodétermination. Bref aperçu de la TAD accessible en ligne : http://selfdeterminationtheory.org/theory/ 

Guay, F., Senécal, C., Gauthier, L. et Fernet, C. (2003). Predicting career indecision : A self-determination theory perspective. Journal of Counseling Psychology, 50(2), 165-177 

Paquet, Y., Carbonneau, N. et Vallerand, R. J. (2016). La théorie de l’autodétermination. Aspects théoriques et appliqués. Bruxelles. De Boeck Supérieur. 

 


Article publié pour la première fois le 25 février 2019.

Psychologue de l’éducation nationale spécialisé en éducation, développement et conseil en orientation scolaire et professionnelle, Laurent exerce en France dans un centre d’information et d’orientation. Depuis 20 ans, il accompagne tout type de public notamment les scolaires. Il a passé une année en qualité d’étudiant au Département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke pour peaufiner ses compétences opérationnelles. Il mesure chaque jour la portée transculturelle d’un counseling au service de l’orientation et du développement de carrière. Il partage son expérience de l’accompagnement via l’écriture et la formation.
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Psychologue de l’éducation nationale spécialisé en éducation, développement et conseil en orientation scolaire et professionnelle, Laurent exerce en France dans un centre d’information et d’orientation. Depuis 20 ans, il accompagne tout type de public notamment les scolaires. Il a passé une année en qualité d’étudiant au Département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke pour peaufiner ses compétences opérationnelles. Il mesure chaque jour la portée transculturelle d’un counseling au service de l’orientation et du développement de carrière. Il partage son expérience de l’accompagnement via l’écriture et la formation.
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