La question qui tue
Lorsque je travaillais comme conseillère en emploi pour des organismes sans but lucratif, j’ai souvent accompagné des personnes immigrantes dans leur processus de recherche d’emploi. Une partie de mon travail consistait à les guider dans la préparation aux entrevues d’embauche. Plusieurs de ces clients n’avaient pas encore d’expérience de travail au Québec. Une question d’entrevue particulièrement redoutable était donc la suivante : « Avez-vous de l’expérience de travail au Québec? ».
On comprend qu’il est difficile d’y répondre lorsque l’on n’a pas d’expérience canadienne. D’un côté, en répondant simplement « non » en toute sincérité, la personne perd des points comparativement à la compétition pour le poste. D’un autre côté, en répondant « oui », l’employeur risque de découvrir éventuellement le mensonge en constatant l’absence de références d’emploi québécois. Et l’honnêteté est une valeur québécoise très importante. Alors, comment répondre à cette question en se donnant toutes les chances d’obtenir l’emploi?
Par ailleurs, le chercheur d’emploi doit toujours se rappeler que s’il est convoqué en entrevue, c’est parce qu’à première vue, l’employeur considère qu’il a les compétences pour occuper l’emploi. Les employeurs ne prennent le temps de rencontrer en entrevue que les personnes qui présentent un potentiel intéressant pour le poste.
La perception de l’employeur
Avant même de chercher la meilleure réponse à cette question, je pense qu’il est important de se demander ce qui pousse l’employeur à poser cette question. On se place ainsi dans une posture permettant de cerner le besoin de l’employeur afin d’y répondre adéquatement. En répondant au besoin de l’employeur, le candidat augmente ses chances d’obtenir l’emploi visé.
En général, une telle question d’entrevue a pour objectif de répondre à deux besoins : assurer une intégration facile à l’équipe de travail et assurer le succès de la réalisation des tâches de l’emploi. Bref, le chercheur d’emploi tente de répondre positivement à ces deux besoins lorsque cette question d’entrevue lui est posée. D’ailleurs, la préparation à cette question d’entrevue exige un important travail ainsi qu’un effort d’introspection.
L’intégration à l’équipe de travail
L’une des craintes de l’employeur est que l’employé ne soit pas capable de s’intégrer à l’équipe de travail, dont plusieurs des membres sont de culture québécoise. Une perte de productivité pourrait résulter de conflits dans le milieu de travail. L’employeur craint que les différences culturelles engendrent des tensions dans l’équipe. Dans ce contexte, comment la personne peut-elle prouver qu’elle saura s’intégrer facilement à l’équipe de travail? Pour ce faire, on doit retenir deux éléments qui facilitent l’intégration à une équipe de travail : les aptitudes sociales et l’expérience qui démontre la capacité d’adaptation dans une équipe dont la culture principale est québécoise.
D’abord, quelles sont les aptitudes sociales qui facilitent l’intégration à une équipe de travail? Il y en a plusieurs et, parmi celles-ci, on retrouve la flexibilité, l’ouverture, l’empathie, l’écoute, les fortes aptitudes d’adaptation et l’authenticité. Déterminer ses aptitudes sociales requiert un important travail d’introspection dans le cadre duquel la personne doit retracer des exemples concrets de son passé où elle a démontré ces aptitudes en question. En cas d’incertitude, les proches sont de bons conseils.
L’important est d’être préparé à présenter des exemples concrets supportant les aptitudes que la personne souhaite mettre en lumière et de faire preuve d’authenticité.
On notera que le chercheur d’emploi qui n’a pas d’expérience de travail au Québec peut démontrer ses aptitudes d’adaptation à la culture québécoise en parlant de ses expériences de bénévolat au Québec, de sa participation à des loisirs ou à des travaux d’équipe au cours d’études effectuées au Québec. Il s’agit donc de démontrer qu’il sait interagir avec des Québécois en groupe et qu’il entretient de bonnes relations avec eux.
La compétence dans la réalisation des tâches de l’emploi
Une autre préoccupation de l’employeur est le succès de l’employé dans la réalisation de ses tâches. C’est pourquoi il cherche d’abord une personne qui a dans le passé déjà accompli avec succès le travail associé au poste visé. D’un pays à l’autre, les postes et les tâches varient. Ainsi, avoir occupé le même poste dans un autre pays ne signifie pas que la personne possède l’expérience recherchée et qu’elle saura accomplir ses tâches avec succès.
En somme, l’attitude à adopter devant la question d’entrevue « Avez-vous de l’expérience de travail au Québec? » en est une d’ouverture. Le candidat doit ainsi accueillir cette question comme un défi à relever plutôt qu’un mur infranchissable. Pour cela, un important travail d’introspection et de préparation doit s’effectuer avant l’entrevue. Une solide préparation aux entrevues d’embauche apporte de la confiance aux candidats et démontre de la motivation à l’employeur. Afin de faciliter la préparation aux entrevues, j’encourage donc les chercheurs d’emploi à consulter des conseillers en emploi qui sauront offrir des conseils personnalisés.
* Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre.