Pourquoi embaucher une personne qui a une maladie chronique?
Marché du travail

Pourquoi embaucher une personne qui a une maladie chronique?

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Dans une culture du bien-être, on pourrait presque croire qu’on a le contrôle sur sa santé. Cependant, si l’activité physique, l’alimentation, le sommeil et la gestion du stress sont des facteurs contribuant au maintien d’une bonne santé, ils ne sont pas une armure contre la maladie et les accidents. Le « contrôle » de sa santé est une illusion. Nos actions ont un impact important, oui, mais nul n’est infaillible face à la maladie et aux accidents.  

C’est dans ce monde que doivent travailler et se tailler une place les personnes qui ont une maladie chronique. Je parle ici de maladies inflammatoires de l’intestin, de fibromyalgie, de la maladie de Lyme ou de migraines chroniques, par exemple. 

Dans ce contexte, je me suis demandé : pourquoi embaucher une personne qui a une maladie chronique? J’élabore. Si la maladie peut affecter négativement la productivité, comment expliquer qu’en contrepartie, il y ait des avantages à embaucher une personne vivant avec une maladie chronique? Et si oui, quels sont-ils exactement? Afin de m’éclairer, j’ai rencontré deux personnes qui travaillent depuis plusieurs années auprès de cette clientèle, soit Marisa Gelfusa et Alexandra Laurent.  

Le côté sombre 

Le côté sombre, c’est la douleur, l’insomnie causée par la douleur, la fatigue engendrée par la douleur et l’insomnie, la douleur qui devient le réveille-matin, le corps rouillé qui a besoin de deux heures le matin avant d’être prêt à faire quoi que ce soit, le jugement des membres de l’équipe de travail, le stress de s’absenter du travail et de perdre son emploi.  

Certains jours, l’énergie est suffisante pour faire une seule chose. Le simple transport pour se rendre au bureau peut prendre ce peu d’énergie qui est encore disponible et faire en sorte qu’il n’en reste plus assez pour travailler ensuite. Que faire lorsque l’employeur est résistant au télétravail?  

Les autres ne remarquent pas les jours où la personne travaille avec le sourire malgré la douleur, l’insomnie, la fatigue, les deux heures de préparation le matin avant d’être seulement capable de sortir de chez elle et tous les stress de son quotidien qui affectent également sa vie personnelle. Ce n’est pas juste la maladie qui est invisible. 

Marisa explique que dans cet univers du travail où la santé fait partie de la normalité qui priorise la productivité, plusieurs personnes qui ont une maladie chronique se sentent différentes, incomprises et défectueuses.  

La personne qui vit avec une maladie chronique cherche des solutions à ses épreuves, elle apprend à vivre avec la douleur, à développer des habitudes de vie saine et à gérer son stress. Toutes ces épreuves et tous ces efforts l’amènent à développer des forces particulières. 

La force 

Marisa explique que dans un monde du travail conçu pour les individus en santé, les personnes qui ont une maladie chronique ont dû développer certaines qualités particulières afin de s’y tailler une place. La force, dans ce contexte, regroupe toutes ces aptitudes que les personnes qui ont une maladie chronique développent au travers des épreuves. 

Alexandra explique qu’afin d’affronter les difficultés propres à leurs limites, les personnes qui ont une maladie chronique font preuve de courage, de créativité et de fortes aptitudes de résolution de problèmes. Plusieurs d’entre elles développent en outre un état d’esprit qui leur permet de reprendre du pouvoir sur leur vie. 

(…) la débrouillardise est une force importante que les personnes qui ont une maladie chronique apprennent rapidement à développer afin de pallier la douleur et les obstacles.
Pour sa part, Marisa explique que les personnes qui ont une maladie chronique ont tendance à être responsables et fiables, travaillantes et perfectionnistes. Afin de contrebalancer le taux d’absentéisme, le manque d’énergie, les préjugés et le sentiment d’être défectueuses que leur projette la société, elles ont tendance à croire qu’elles doivent travailler plus fort et faire mieux. De plus, elle explique que les personnes qui ont une maladie chronique démontrent de fortes aptitudes de lecture du langage non verbal afin de savoir en qui elles peuvent avoir confiance. 

Selon Alexandra et Marisa, les personnes qui ont une maladie chronique ont une bonne connaissance de soi en ce qui concerne leurs forces et limites physiques afin de s’adapter au milieu et de faire preuve d’efficacité. D’après Marisa, elles « sont capables de cerner les objectifs d’une tâche » afin de déterminer rapidement leur capacité d’exécution. Par exemple, elles connaissent les moments de la journée et les périodes du mois au cours desquels elles sont plus ou moins productives et organisent leur horaire de travail et leurs tâches en fonction de cela si l’employeur leur offre cette flexibilité.  

Alexandra et Marisa s’accordent également pour dire que la débrouillardise est une force importante que les personnes qui ont une maladie chronique apprennent rapidement à développer afin de pallier la douleur et les obstacles. Marisa les décrit plus spécifiquement comme étant pleines de ressources, car leur état de santé instable fait en sorte qu’elles doivent compter sur des ressources dans un monde conçu pour les personnes en santé.   

En somme, les personnes qui ont une maladie chronique sont confrontées à d’importants obstacles qui affectent toute leur vie. En offrant un milieu de travail ouvert, empathique et flexible, les employeurs trouveront des trésors chez cette catégorie de travailleurs. Pourquoi ne pas mettre les valeurs humaines en avant-scène, contrairement aux environnements de travail malsains qui valorisent la productivité au détriment du bien-être? Et si la productivité venait d’elle-même d’un milieu de travail qui valorise l’ouverture, l’empathie et la personne? 

Pourquoi ne pas adapter le milieu de travail à la personne plutôt que l’inverse? Par exemple, si certaines personnes, pour des raisons qui leur sont personnelles, préfèrent le télétravail, pourquoi ne pas le leur permettre si cela est possible? Certaines personnes sont plus productives en télétravail, alors que pour d’autres, c’est le contraire. Pourquoi ne pas faire confiance aux individus afin qu’ils décident eux-mêmes ce qui est mieux pour eux? 

Finalement, pourquoi embaucher une personne qui a une maladie chronique? Pour les mêmes raisons que l’on embaucherait une personne qui n’a pas de maladie chronique, parce que c’est la personne qui convient le mieux au poste et à l’équipe, et parce que votre entreprise valorise l’humain. 

  

* Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre.  

Hélène Brisebois est conseillère d’orientation pour Counseling Aspiraxion. Elle a travaillé plusieurs années en tant qu’aide pédagogique individuelle au collégial et à titre de conseillère en emploi. De plus, elle est titulaire d’une maîtrise en orientation de l’Université de Sherbrooke et d’un baccalauréat en psychologie de l’Université Concordia.
https://savoirs.usherbrooke.ca/handle/11143/18981
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Hélène Brisebois est conseillère d’orientation pour Counseling Aspiraxion. Elle a travaillé plusieurs années en tant qu’aide pédagogique individuelle au collégial et à titre de conseillère en emploi. De plus, elle est titulaire d’une maîtrise en orientation de l’Université de Sherbrooke et d’un baccalauréat en psychologie de l’Université Concordia.
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