La reconnaissance en emploi
Marché du travail

La reconnaissance en emploi

Temps de lecture : 3 minutes

Selon des rapports présentés au printemps dernier, le Canada aura à combler une importante pénurie d’environ 240 000 travailleurs dans les prochaines années. Plus particulièrement, au Québec, les régions plus éloignées seront significativement touchées par la pénurie en raison de la difficulté à recruter et à retenir les travailleurs, avec en 2018, près de 2 à 3 % des emplois de ces régions restés vacants selon Statistique Canada. De manière générale, toutes les régions du Québec sont présentement touchées par une importante pénurie de main-d’œuvre, particulièrement préoccupante dans l’industrie touristique, incluant les secteurs tels que l’hôtellerie et la restauration. Il semble donc venu le temps de colliger nos efforts afin d’identifier et de comprendre les éléments sur lesquels agir pour favoriser l’embauche, l’intégration et la rétention des travailleurs au Canada, et encore plus au Québec, notamment dans l’industrie du tourisme. Plus précisément, il nous tarde de mieux comprendre ce que les travailleurs viennent chercher dans le contexte de travail, et particulièrement dans leur choix d’organisation.

La concurrence pour embaucher et garder son bassin de talents devient donc une préoccupation croissante pour les organisations.
De plus, au cours des dernières années, l’évolution du marché du travail a révélé une quête collective pour une plus grande reconnaissance de la contribution des employés dans leur milieu de travail. Les gens réfléchissent désormais énormément avant de décider où et pour qui travailler, et sont à la recherche constante d’emplois et d’organisations correspondant à leurs valeurs et aspirations. Dans cette quête de sens et de reconnaissance, ils se soucient de travailler pour des organisations au sein desquelles ils peuvent réellement contribuer et où leur implication aura une réelle importance. Ils recherchent des emplois dans lesquels ils éprouvent un véritable sentiment d’appartenance envers l’organisation, leurs collègues et leurs superviseurs et où ils peuvent être reconnus pour leurs efforts. Ainsi, de nos jours, les travailleurs recherchent davantage qu’un simple salaire; ils souhaitent occuper un emploi stimulant leur permettant de développer leurs compétences et de se sentir appréciés à leur juste valeur. En outre, bien que la masse salariale représente plus d’un cinquième du budget annuel des organisations, plus de 80 % des employés rapportent ne pas se sentir suffisamment appréciés ou valorisés au travail et 40 % affirment qu’ils travailleraient plus fort si leur contribution était davantage reconnue.
En somme, les employés veulent de plus en plus se sentir appréciés pour leurs efforts et leurs contributions.

 

Cette apparente «soif» de reconnaissance a par conséquent mené les organisations à rechercher, à développer et à tester divers moyens novateurs et efficaces pour générer et favoriser un sentiment de reconnaissance chez leurs employés. Face à la pénurie de main-d’œuvre, encourager la satisfaction, l’engagement et la motivation au travail, mais aussi le soutien social entre collègues et la reconnaissance en emploi sont de plus en plus au coeur des priorités des organisations. En ce sens, les organisations cherchent dorénavant à explorer des solutions concrètes afin d’être reconnues sur le marché comme de bons employeurs, là où il fait bon travailler, afin de combler leurs difficultés de recrutement et de rétention.

Dans cette optique, une récente tendance dans les organisations est d’utiliser des formes alternatives de récompenses en emploi (ex. : e-cards, certificats-cadeaux, système de points échangeables pour des produits de luxe, des voyages et autres), visant à favoriser la communication et à augmenter la reconnaissance en milieu de travail. Plusieurs organisations se sont donc récemment tournées vers l’utilisation de pratiques innovatrices en rémunération afin de favoriser le renforcement positif et la reconnaissance entre employés, collègues et superviseurs. Ces nouvelles stratégies sont promues comme étant efficaces pour créer une culture de reconnaissance en milieu de travail, et ainsi attirer les talents et valoriser les employés.

Bien qu’il existe peu de recherches sur ces nouvelles stratégies de rémunération, certaines études basées sur la théorie motivationnelle de l’auto-détermination ont été menées pour mieux comprendre le lien entre la rémunération, la motivation et la performance des employés. Mes propres travaux de recherche visaient à expliquer comment et pourquoi les récompenses monétaires offertes au travail ont un effet à la fois bénéfique et néfaste sur les employés. Suivant l’évolution actuelle du monde du travail, ma plus récente ligne de recherche porte sur les différents types de récompenses monétaires et non monétaires offertes au travail (ex. : congés payés, certificats-cadeaux, bons expérientiels : voyages, restaurants, activités) et les mécanismes psychologiques expliquant comment et pourquoi certains types de récompenses monétaires et non monétaires offertes dans divers secteurs d’activité contribuent positivement au sentiment d’appréciation et de reconnaissance des employés, favorisant ainsi une motivation saine, une meilleure performance et un plus haut niveau de bien-être au travail. Ainsi, ces pratiques émergeantes semblent avoir le potentiel d’améliorer la santé économique des régions du Québec qui souffrent déjà de la pénurie de main-d’œuvre. Espérons que ce type d’iniatives permettra d’améliorer le recrutement et la rétention de travailleurs locaux et internationaux, tout en misant sur la valorisation des tâches, des rôles et des compétences des employés et la création d’une culture de reconnaissance, et ainsi pallier les risques auxquels feront face divers secteurs d’activité, tels que le toursime québécois, dans les prochaines années.

Fascinée par les dynamiques interpersonnelles et passionnée par la recherche, Anaïs a obtenu son baccalauréat en psychologie sociale à l’Université McGill, et son doctorat en psychologie industrielle et organisationnelle à l’Université du Québec à Montréal. À présent post-doctorante, elle mène plusieurs projets de recherche de front, en plus d’enseigner, de travailler en consultation et de s’impliquer dans la communauté locale. Elle a à son actif de nombreuses publications et présentations dans des congrès scientifiques et professionnels, portant, entre autres, sur le lien entre la rémunération, la motivation et l’expérience des employés.
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Fascinée par les dynamiques interpersonnelles et passionnée par la recherche, Anaïs a obtenu son baccalauréat en psychologie sociale à l’Université McGill, et son doctorat en psychologie industrielle et organisationnelle à l’Université du Québec à Montréal. À présent post-doctorante, elle mène plusieurs projets de recherche de front, en plus d’enseigner, de travailler en consultation et de s’impliquer dans la communauté locale. Elle a à son actif de nombreuses publications et présentations dans des congrès scientifiques et professionnels, portant, entre autres, sur le lien entre la rémunération, la motivation et l’expérience des employés.
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