Lorsque le sentiment d'efficacité personnelle freine l'action
Marché du travail

Lorsque le sentiment d’efficacité personnelle freine l’action

Temps de lecture : 4 minutes

La confiance en soi peut être un élément déterminant dans une prise de décision ou une mise en action. La personne se projette dans un contexte à venir en fonction de l’impression qu’elle a d’elle-même, amenant une anticipation de résultats variables. Cela étant dit, cette expérience cognitive peut être portée à se résoudre par l’interprétation d’une série de conclusions, peut-être émotives, sur des expériences personnelles passées. 

Par exemple, en développement de carrière, une personne peut se sentir peu confiante pour se présenter à une future entrevue, avoir l’impression qu’elle ne répondrait pas aux attentes dans un certain type d’emploi ou encore croire qu’elle ne serait pas suffisamment bonne pour être admise, éventuellement, dans un programme donné. 

Alfred Bandura (1977, 2001) parlait des sentiments d’autoefficacité comme étant des attentes variables par rapport à la réalisation personnelle de certaines activités. De façon intéressante, il déterminait quatre sources d’où ces attentes pouvaient prendre racine :  

      1. Les expériences personnelles passées, où la personne a déjà vécu un contexte semblable d’où elle peut tirer des conclusions quant à elle-même. 
      2. La persuasion verbale de son entourage ou d’acteurs importants.  
      3. Les expériences vicariantes où la personne est témoin d’un contexte. 
      4. L’expérience émotionnelle ou physiologique quand elle se projette ou se rappelle le contexte. 

Les implications des différentes sources du sentiment d’efficacité personnelle (SEP) font en sorte qu’une personne manifestant un discours plutôt défaitiste sur ses capacités n’a pas nécessairement vécu d’échecs préalables « validant » cette supposée incapacité. Et même dans la conclusion d’échecs répétés, ladite conclusion pourrait être discutable. 

Le SEP est malléable, sous-entendant qu’il est possible de l’accroître.

Lorsque le frein à l’action relève un manque de confiance en ses capacités, différentes interventions peuvent être mises de l’avant dans le but de l’accroître si cela rejoint les objectifs de la personne. Bien sûr, il demeure au jugement du conseiller si, pour le client et dans son contexte, il demeure bénéfique d’intervenir de la sorte. L’objectif n’est pas non plus de placer ou replacer la personne dans un contexte d’échec. 

La suite de l’article a pour visée de partager différentes interventions pouvant être mises de l’avant auprès d’une clientèle se freinant par un SEP plus faible. Elles n’ont pas la prétention de s’appliquer à tous les contextes et pour tous les clients. En voici quelques-unes pouvant aider à stimuler le SEP dans le but d’amener de l’ouverture à une mise en action. 

      • Explorer les expériences de succès passés et amener la personne à les verbaliser  

L’exploration des expériences passées peut amener la personne à reconnecter avec des expériences de succès et se les approprier davantage lorsqu’elle s’entend en parler. Par exemple, une personne vivant du stress en prévision d’une entrevue pourrait gagner en confiance en verbalisant ses bons coups et ses expériences positives en contexte d’entrevues passées, à la suite desquelles elle a décroché un emploi. 

      • Faire parler la partie de soi qui y croit 

Lorsqu’une personne est incertaine de son efficacité ou de sa réussite, elle n’est pas nécessairement convaincue d’échouer non plus. D’évaluer initialement, par exemple, à 20 % ses chances de réussite, suppose qu’une partie de soi croit tout de même qu’elle est possible. D’amener la personne à laisser parler cette partie d’elle qui y croit, puis de faire des liens avec ses valeurs et ambitions peuvent l’amener à s’ouvrir davantage à une discussion concernant une mise en action et à réévaluer son niveau de confiance quant à la tâche. 

      • Reconsidérer les différents résultats possibles  

Il survient parfois que les seules conclusions anticipées soient la réussite idéale ou l’échec total, sans considérer un éventail possiblement large de possibilités entre les deux. Il peut donc dans certains contextes y exister une panoplie de résultats relativement souhaitables, qui sont suffisamment intéressants et réalisables pour que la personne ressente davantage de confiance et de conviction à se mobiliser en reconsidérant l’ensemble des possibilités. 

      • Le conseil à un ami 

En juxtaposant le contexte du client à l’un de ses proches et en le questionnant sur le conseil qu’il aimerait offrir à cette personne, il est probable que le conseil mis de l’avant serait également celui que le client souhaiterait s’offrir à lui-même. L’exercice de réflexion peut aider à faire prendre conscience de la direction vers laquelle le client souhaite réellement s’engager et se préparer à l’action. 

      • Sonder les caractéristiques d’une personne efficace et explorer celles mentionnées par la personne 

En explorant davantage ce que constitue pour le client une personne compétente dans le contexte concerné, celui-ci peut y verbaliser ses attentes envers lui-même. En discutant avec lui des éléments mentionnés, il peut y réviser sa perception de lui-même ou y réviser ses attentes, ce qui peut amener davantage d’ouverture à l’action. 

      • Se projeter dans l’action 

Certains clients ont vécu par le passé une expérience d’échec qui les freine dans une nouvelle tentative. En plaçant l’expérience passée comme une opportunité d’avoir acquis des connaissances sur eux ou sur ce qui les attend, il peut être intéressant, malgré tout, de se projeter dans un nouvel essai, puis de discuter de ce qui serait fait différemment cette fois-ci. 

L’intervention auprès du SEP, comme bien d’autres interventions, interpelle la personne à se préparer à un changement ou à une initiative.

De se croire efficace et capable n’opère pas le changement, mais peut aider à passer de la contemplation de ses options à l’action.

Une exploration des risques anticipés dans le but de diminuer leur emprise sur la personne peut également aider à l’ouverture au changement. 

* Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre.   

 

Références

Bandura, A. (1977). « Self-efficacy: Toward a unifying theory of behavior change » dans Psychological Review, 84, 191-215. 

Bandura, A. (2001). « Social cognitive theory: An agentic perspective » dans Annual Review of Psychology, 52, 1-26. 

Conseiller d’orientation chez BrissonLegris, Vincent est titulaire d’un baccalauréat en psychologie, d’une majeure en développement de carrière et d’une maîtrise en counseling de carrière. Il s’est grandement intéressé au cours de ses études à l’entretien motivationnel en contexte de réorientation et d’adaptation au travail. Il est également rédacteur pour l’infolettre de l’AQPDDC.
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Conseiller d’orientation chez BrissonLegris, Vincent est titulaire d’un baccalauréat en psychologie, d’une majeure en développement de carrière et d’une maîtrise en counseling de carrière. Il s’est grandement intéressé au cours de ses études à l’entretien motivationnel en contexte de réorientation et d’adaptation au travail. Il est également rédacteur pour l’infolettre de l’AQPDDC.
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