À la recherche du prêt-à-porter en emploi
Marché du travail

À la recherche du prêt-à-porter en emploi

Ce n’est pas seulement dans les relations amoureuses que le mythe du Prince charmant a la vie dure! Au travail également. En effet, nombreuses sont les personnes qui espèrent trouver l’emploi parfait, celui qui les comblera en tous points, qui leur offrira l’occasion de se réaliser, de s’épanouir, d’avoir un bon salaire, une sécurité d’emploi, des possibilités d’avancement, des collègues sympathiques, etc. La liste peut être longue, mais dans les faits, rares sont les personnes qui arrivent à trouver ce « prêt-à-porter professionnel » dès leur entrée sur le marché du travail. Certaines n’y arriveront jamais au cours de leur vie active. Pire, bien des gens continuent à chercher l’emploi idéal, passant d’un emploi à l’autre, déçus à chaque fois que celui-ci ne comble pas toutes leurs attentes, comme en témoignent les nombreuses demandes de consultations pour une réorientation. C’est comme si le même phénomène que l’on peut observer lorsque nous souhaitons être en relation – espérer trouver quelqu’un qui va nous comprendre, nous combler, répondre à nos besoins, de façon quasi idéale – s’observe également dans la relation au travail que bien des gens entretiennent.

Autant en amour qu’au travail, lorsque les difficultés surgissent et que cela amène des émotions et des ressentis négatifs, le doute s’installe et nous fait imaginer que le gazon est plus vert ailleurs. 
En fait, pour une majorité de personnes, le travail, qui a comme principale fonction d’assurer un revenu de subsistance, s’est transformé en gagne-pain qui doit combler toutes les attentes : l’emploi « Prince charmant », en quelque sorte. En effet, dans nos sociétés contemporaines, la possibilité existe, pour plusieurs d’entre nous, d’évoluer dans un domaine professionnel qui correspond à nos valeurs, à nos goûts, et qui nous permet de nous développer de façon satisfaisante, d’être sur notre « X ». Le travail étant vu, dans ce cas, comme une prolongation de soi, une part primordiale de son identité (certains se définissent même par lui… de la tête au pied!), la quête de l’emploi idéal prend tout son sens. Dans un tel contexte, comment s’étonner que tant de personnes ne sachent pas comment composer avec la déception liée au marché du travail! Comment être surpris que les sondages des dernières années observent que près de 50 % des gens se disent insatisfaits de leur travail! De surcroit, avec la pandémie actuelle, un sondage récent montre que plus de la moitié des Canadiens envisageraient de changer d’emploi en raison de problèmes liés à la rémunération, la baisse de satisfaction ou le bien-être général. 

Inévitablement, il y a déception. On a beau choisir un domaine et s’imaginer y être heureux, un monde existe entre ce point de départ et la réalité du terrain. Ne serait-ce que parce qu’un milieu de travail est composé d’humains, avec leurs besoins, leurs comportements et leurs codes respectifs. Ajoutez à cela les environnements de travail, dont certains peuvent être agréables, d’autres malsains, voire toxiques, les exigences liées à un poste donné, le manque de reconnaissance, les problèmes de communication et ainsi de suite, les probabilités qu’un domaine, un milieu, un emploi ne nous conviennent pas totalement sont assez grandes.

Si, en plus, on entretient toujours ce rêve, ce fantasme de l’emploi idéal qu’il nous suffit de trouver, il devient difficile d’accepter de s’engager dans un travail qui nous laisse sur notre faim.

D’où l’analogie du prêt-à-porter : tel un habit qu’un tailleur nous ferait sur mesure, notre cerveau nous entraîne dans la quête de l’emploi parfait, celui qui est « fait pour nous ». 

Loin de moi l’idée de m’opposer au changement d’emploi ou de domaine. Le changement peut être salutaire, voire nécessaire, dans plusieurs cas. Pensons aux travailleurs en situation de harcèlement ou d’épuisement professionnel, à certains milieux toxiques, et j’en passe. 

Bien que plusieurs personnes aient fait des virages à 180 degrés et se soient réinventées dans un autre domaine qui leur convient mieux, mon expérience m’a démontré que la plupart des gens qui consultent pour une réorientation restent, finalement, dans le même domaine. Ce qui a changé? Le regard que ces personnes posent sur elles-mêmes, sur leurs perceptions et leurs besoins, mais aussi, sur l’impact qu’elles peuvent avoir au niveau professionnel pour être davantage satisfaites. En ce sens, la démarche d’orientation (ou de réorientation) les a aidées à recadrer leurs besoins de changement et leurs insatisfactions, et surtout, à revoir de façon plus réaliste les critères de « l’emploi parfait ». Celui-ci sera davantage en accord avec elles-mêmes et ainsi, la route à construire pour y arriver deviendra plus accessible.  

  

*Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre. 

Nathalie Ross Author
Nathalie Ross, c.o. et psychothérapeute, travaille depuis plusieurs années à titre de conseillère d’orientation et de psychothérapeute auprès d’une clientèle variée, en pratique privée et pour l’organisme en employabilité CODEM. Elle est également superviseure clinique pour des équipes de c.o. et de c.e. et donne aussi à l’occasion des ateliers de formation et des conférences. Elle travaille avec la perspective psychogénétique depuis ses études en orientation à l’UQAM et avec la perspective ACT depuis quelques années. Elle est également présidente de l’Institut de recherche fondamentale et clinique en psycho-orientation (IRFCPO), institut qui chapeaute la perspective psychogénétique.
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Nathalie Ross Author
Nathalie Ross, c.o. et psychothérapeute, travaille depuis plusieurs années à titre de conseillère d’orientation et de psychothérapeute auprès d’une clientèle variée, en pratique privée et pour l’organisme en employabilité CODEM. Elle est également superviseure clinique pour des équipes de c.o. et de c.e. et donne aussi à l’occasion des ateliers de formation et des conférences. Elle travaille avec la perspective psychogénétique depuis ses études en orientation à l’UQAM et avec la perspective ACT depuis quelques années. Elle est également présidente de l’Institut de recherche fondamentale et clinique en psycho-orientation (IRFCPO), institut qui chapeaute la perspective psychogénétique.
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