Présenter le counseling de carrière aux financeurs : « Le counseling, une force codéveloppementale »
Marché du travail

Présenter le counseling de carrière aux financeurs : « Le counseling, une force codéveloppementale »

Temps de lecture : 4 minutes

Des potentiels financeurs de services en orientation et en développement de carrière ainsi que de formation en counseling de carrière sont légitimement en attente de données probantes préalablement à un éventuel financement. Voici en partage comment j’ai été amené à présenter le counseling de carrière en France. Cette réponse possible présente les preuves d’un counseling au service de l’orientation et du développement de carrière. 

Le marché du travail se caractérise par sa segmentation, ses fluctuations multiformes et son imprévisibilité. Les milieux de formation initiale et continue traversent également des changements. Ceux-ci ont un impact direct et indirect sur les individus. L’interaction entre individu et environnement produit un écart dont les coûts sont élevés pour les individus et pour la société.

Le décrochage scolaire, la peur de l’engagement dans le monde du travail, l’indécision chronique, la détresse psychologique, l’épuisement professionnel et, plus globalement, les problèmes d’insertion et d’adaptation engendrent des coûts sociaux et psychologiques.

Par exemple, le nombre de jeunes déscolarisés et sans emploi représente un coût économique compris entre 324 et 544 milliards d’euros (entre 437 et 735 milliards de dollars canadiens.), soit de 0,9 % à 1,5 % du PIB de la zone OCDE (source OCDE ). Les problèmes de carrière ont donc des conséquences sur les individus, les organisations et la société. Cet écart entre individu et environnement socioprofessionnel est abordé traditionnellement comme un problème à résoudre. Celui-ci représente également une opportunité de développement tant pour les individus que pour les organisations. 

Ainsi, d’un certain point de vue, la recherche d’efficacité des interventions, notamment en orientation et en développement de carrière, répond à des enjeux humains, sociaux et économiques. Les individus sont amenés à chercher un équilibre entre obsolescence professionnelle (désengagement) et épuisement professionnel (surrengagement). Quant à elles, les organisations sont poussées à trouver un équilibre entre la gestion des compétences obsolètes (sous-régime) et la gestion des talents (équilibre), mais aussi de l’épuisement professionnel(surrégime). 

De nombreuses organisations en francophonie méconnaissent, voire ignorent, le counseling de carrière.
La recherche d’efficacité est aussi un enjeu culturel qui passe par la formation 

Des organisations (scolaires et professionnelles) ignorent que le counseling de carrière fait partie des approches qui favorisent leur développement ainsi que celui des individus. Pourtant, de nombreuses recherches démontrent son utilité, parmi lesquelles la méta-analyse de Whiston et al. (1998), les études de Brown et Kane (2000), de Heppner et Heppner (2001) et de Masdonati (2014). Ces études apportent le recul et la preuve que les interventions en counseling de carrière sont utiles. 

Des processus psychologiques interviennent aussi dans les choix de carrière (orientation, insertion, adaptation). Les méthodes d’accompagnement de carrière doivent donc tenir compte à la fois des enjeux de la formation, de la labilité du marché du travail, de la culture des organisations et des processus psychologiques inhérents à chaque personne. Ceux-ci sont non linéaires, pluridimensionnels et complexes. 

L’alliance de travail représente l’un des ingrédients relationnels clés en counseling (Gelso et Samslag, 2008 ; Muran et Barber, 2010 ; Norcross, 2011) comme en counseling de carrière (Heppner et Heppner, 2003). Les recherches centrées sur l’efficacité de l’alliance de travail permettent de prédire les résultats d’une intervention (Flückiger, Del Re, Wampold, Symonds et Horvath, 2012 ; Martin, Garske et Davis, 2000). 

En quoi cette méthode est-elle utile? 

Quelques indicateurs d’utilité en counseling de carrière : 

Indicateurs finaux : 

  • inscription en formation, 
  • insertion en emploi, 
  • maintien en formation ou en emploi, 
  • satisfaction en formation et en emploi. 

Indicateurs intermédiaires : 

  • peur moindre de l’engagement en formation ou sur le marché du travail, 
  • diminution de l’indécision chronique, 
  • meilleure estime de soi, 
  • connaissance de soi améliorée (intérêts, aptitudes, valeurs, croyances), 
  • restructuration des croyances dysfonctionnelles ou erronées, 
  • diminution de l’anxiété et de la détresse psychologique, 
  • enrichissement du sentiment d’efficacité personnelle, 
  • élévation du niveau d’information sur le marché du travail, 
  • meilleures relations avec les pairs (collègues et supérieurs hiérarchiques), 
  • réalisme des choix de carrière et des choix de vie, 
  • démarches de recherche d’informations, 
  • capacité accrue à prendre des décisions, 
  • certitude et satisfaction améliorées quant aux choix, 
  • accroissement du nombre d’options possibles, 
  • élévation du temps consacré à réfléchir avant une prise de décision, 
  • élargissement des choix au-delà des stéréotypes de genre, 
  • développement des performances scolaires et professionnelles, 
  • maturité vocationnelle, 
  • renforcement du besoin de réussite, 
  • meilleure congruence du concept de soi, 
  • reconnaissance du sentiment d’être aidé. 

Certaines personnes ont envie d’apprendre de nouvelles choses, d’avoir de bonnes relations, d’être reconnues, valorisées, autonomes… 

Certaines organisations voudraient se développer en attirant et retenant les meilleurs profils… 

Peut-on favoriser une synergie entre individus et organisations? Parfois. Comment? Cette synergie est réalisable lorsque l’organisation et l’individu ne s’opposent pas, lorsque leur alliance créé une force codéveloppementale. Cette force se nourrit de la rencontre entre besoins psychologiques positifs (autonomie, compétences, relation, sécurité, estime de soi) et besoins organisationnels (de compétences, notamment). 

 

* Dans le but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture, le générique masculin est utilisé comme genre neutre. 

Annexe

Définition : la carrière, terme issu du latin carrus signifiant char ou chariot, désigne non seulement le métier que vous avez envie d’occuper mais aussi la façon dont vous voulez vivre votre vie et influencer le monde. Elle concerne donc le choix et la concrétisation d’un style de vie.

Définition : le counseling de carrière est une forme d’intervention psychologique et sociale qui a pour but d’aider des personnes de tout âge, à toutes les étapes de leur vie, à choisir une occupation et à s’y préparer, à s’insérer dans le monde du travail et à s’y adapter, à s’y maintenir et à y progresser (Guédon et al, 2011, p13). Le counseling est donc une méthode au service de l’orientation et du développement de carrière. 

Définition : le développement de carrière peut être défini comme l’ensemble des opportunités et des actions mises en œuvre en tant qu’organisation pour attirer, retenir et motiver les employés et en tant qu’individu pour en apprendre davantage et évoluer dans son parcours. 

Psychologue de l’éducation nationale spécialisé en éducation, développement et conseil en orientation scolaire et professionnelle, Laurent exerce en France dans un centre d’information et d’orientation. Depuis 20 ans, il accompagne tout type de public notamment les scolaires. Il a passé une année en qualité d’étudiant au Département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke pour peaufiner ses compétences opérationnelles. Il mesure chaque jour la portée transculturelle d’un counseling au service de l’orientation et du développement de carrière. Il partage son expérience de l’accompagnement via l’écriture et la formation.
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Psychologue de l’éducation nationale spécialisé en éducation, développement et conseil en orientation scolaire et professionnelle, Laurent exerce en France dans un centre d’information et d’orientation. Depuis 20 ans, il accompagne tout type de public notamment les scolaires. Il a passé une année en qualité d’étudiant au Département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke pour peaufiner ses compétences opérationnelles. Il mesure chaque jour la portée transculturelle d’un counseling au service de l’orientation et du développement de carrière. Il partage son expérience de l’accompagnement via l’écriture et la formation.
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