Je viens d’aller au lancement de livre d’un ami poète. Après nous avoir introduit et lu sur fond musical quelques extraits de son recueil, il s’offrit pour répondre aux questions. Or, inévitablement, l’une des questions portait sur la genèse de ce livre.
Il nous expliqua alors que la première mouture de ce livre remontait à il y a 3 ans. Il l’avait alors soumise à une poétesse qu’il considérait comme son mentor. Dix-huit heures plus tard son manuscrit lui revint les marges truffées de commentaires rouges. Découragé, il le rangea tout au fond d’un tiroir espérant ainsi tourner la page et l’oublier. Quelques mois plus tard, au gré d’une opération rangement, il revisita ce manuscrit toujours maculé de rouge et, avec le recul, trouva que la majorité des commentaires était très pertinente.
Il reprit donc ce manuscrit en tenant compte de ces annotations et le soumis à nouveau à son mentor. Mais, encore une fois, son document lui revint avec presque autant d’annotations écarlates. Nouveau découragement, nouveau rangement, encore plusieurs mois de jachère et reprise une deuxième fois de l’œuvre à la lumière des nouveaux commentaires qui lui apparaissaient encore une fois justifiés.
Cette troisième version complétée, il la déposa sur sa table de travail, laissa passer quelques jours, puis en fit une dernière lecture avec en écho son épouse et complice. Alors il eut la certitude qu’il rejoignait en quelque sorte son mentor intérieur qui lui manifesta que cette œuvre méritait enfin des annotations en vert! Conséquemment, il entreprit la démarche d’édition du livre dont il venait de lire quelques extraits; opération qui avait soulevé que des commentaires positifs de la part de son auditoire.
À quoi sert un mentor s’il ne dérange pas son protégé/mentoré? Et si ses annotations si écarlates soient-elles n’étaient pas un feu rouge mais visaient simplement l’émergence d’un feu vert de la part de son propre mentor intérieur?
Cet article est paru à l’origine sur le site Orientaction.ca le 20 décembre 2017.